On le sait tous, avec l’arrivée du professionnalisme, les staffs des clubs se sont étoffés et de nouvelles fonctions sont apparues, comme par exemple conseiller performance, responsable skills et… directeur du rugby. Personnellement, j’ai occupé cette fonction pendant trois ans et pas n’importe où, puisque j’étais directeur du rugby au PSG. Non, pas celui auquel vous pensez (encore que le PSG a eu une équipe de Rugby à XIII en super League à la fin des années 1990, mais j’étais très pris par mon Brevet des collèges à l’époque…), puisque j’étais en poste au Petőfi Sándor Gimnázium, c'est-à-dire au lycée public Sándor Petőfi 1 d’Aszód, une petite ville à une petite cinquantaine de kilomètres à l’Est de Budapest.
Contrairement à la plupart de mes plus illustres collègues, ma nomination s’est faite totalement par hasard. Tout d’abord, rien ne me destinait à coacher, puisque j’ai moi-même commencé le rugby très tard et n’ai joué qu’à un niveau très modeste. Ayant grandi dans un petit village de l’Allier où il n’y avait pas de rugby, j’en ai fait pour la première fois au collège en cours d’EPS, comme beaucoup de gamins, mais ça ne m’a pas marqué plus que ça: j’ai vraiment commencé à m’y intéresser pendant la Coupe du Monde 1999. Après deux-trois mercredis après midi à jouer en douce avec quelques copains du lycée sur le terrain du club voisin, je m’y suis vraiment mis en arrivant à l’Université à Clermont-Ferrand: là, j’ai joué deux-trois saisons dans l’équipe de ma fac et suis devenu fan de l’ASM.
Equipe de la fac de Lettres à Clermont, printemps 2006. Photo : collection personnelle.
Accessoirement, j’ai aussi décroché mon diplôme et fait deux séjours d’études en Europe centrale, le premier en Pologne et le second en Hongrie. J’ai ensuite vécu dans ce pays pendant trois ans et j’ai travaillé comme enseignant dans la ville de Pécs (Sud), dont j’ai intégré l’équipe locale de rugby à XV pour deux saisons. Après un bref passage par la France, je suis retourné en Europe centrale, cette fois-ci en République Tchèque, dans la ville d’Olomouc (Est du pays). Là-bas, je me suis empressé de contacter l’équipe locale et le lendemain de mon arrivée en ville, je faisais mon premier entrainement au club. J’y ai fait à nouveaux deux saisons, principalement à XV, mais aussi à VII, avant de repartir pour la Hongrie, où j’ai enseigné le français au fameux lycée PSG d’Aszód de septembre 2017 à juin 2020.
La deuxième raison pour laquelle cette nomination était des plus inattendues, c’était qu’il n’existait naturellement pas d’activité rugby au lycée quand j’y suis arrivé: la plupart des élèves et des collègues ne savaient pas ce que c’était, ceux qui pensaient savoir confondaient généralement avec le foot américain. Quant aux clubs les plus proches, ils se trouvent dans la banlieue de Budapest, à 40 ou 50 kilomètres, pas l’idéal pour les entrainements en commun.
Moi-même, je n’avais pas vraiment prévu de démarrer une activité rugby dans l’établissement, mais quelques semaines après mon arrivée, j’ai effectué, sur la suggestion d’un des mes collègues, un petit entrainement de rugby à toucher pendant la journée « Sport et Santé » du lycée: parmi les seize élèves présents, beaucoup souhaitaient essayer le rugby avec contact et nous avons donc commencé les entrainements dès le mois de novembre avec une dizaine d’élèves, principalement des garçons, mais aussi quelques filles.
Initiation au Touch Rugby, Octobre 2017. Photo : Péter Balogh
Bien évidemment, mon quotidien en tant que directeur du rugby au PSG n’avait pas grand-chose à voir avec celui des responsables de clubs pro et tout à voir avec celui des dirigeants bénévoles des petits clubs amateurs et des écoles de rugby, puisque je faisais tout moi-même: les entrainements, les affiches d’informations, l’acquisition du matériel, les relations avec les clubs, les demandes de subventions…
Après avoir mené de front Rugby et Touch Rugby pendant quelques mois, cette dernière activité a cessé faute de participants et nous avons donc continué le rugby contact avec une grosse douzaine d’élèves. La plupart des entrainements étaient mixtes, car il y avait toujours une ou deux filles à chaque séance: les différentes tentatives pour mettre en place des séances réservées aux filles n’ont vraiment porté leur fruits que durant la dernière année.
Malgré la présence de deux ou trois joueuses très motivées depuis le début de l’aventure, la venue de nouvelles joueuses a longtemps été compliquée par l’appréhension du contact et dans certains cas par les réticences des parents: la Hongrie est en effet un pays plus conservateur que la France et plusieurs mamans trouvaient ainsi que le rugby « n’était pas un sport pour les files… »
Equipe féminine, automne 2019. Photo: collection personnelle
Malgré ces difficultés au niveau des effectifs, les choses se sont organisées petit à petit: en plus du soutien de la direction qui a mis à notre disposition les différentes infrastructures sportives de l’établissement, la fondation de l’établissement a financé l’achat de matériel. De notre coté, nous avons participé à tous les évènements de l’école pour faire connaitre le rugby et inviter le plus de jeunes possibles à nous rejoindre.
A défaut d’avoir été soutenus par la fédération (mise en sommeil du programme Get Into Rugby dans le pays en 2018), nous avons aussi pu compter sur l’aide de deux clubs de rugby hongrois, les Exiles de Budapest et le Rugby Club de Tárnok. Avec le premier, nous avons fait plusieurs entrainements communs et monté une équipe commune pour un tournoi de rugby à 7 début 2019; grâce à la générosité du président du club, M. François Taillandier, nous avons également reçu de superbes tenues de match quelques mois plus tard.
Les joueurs avec leur nouvel équipement, printemps 2019 Photo : collection personnelle
Le second club, celui de Tárnok, dans la grande banlieue Ouest de Budapest, nous a quant à lui invités régulièrement à ses compétitions; le président du club, M. Csaba Stekler et les deux entraineurs, MM. Thomas Aponte et Dániel Szontágh, ont ainsi tout mis en œuvre pour que nous puissions participer à notre premier tournoi au mois de février 2019, nous prêtant notamment des maillots et deux joueurs pour l’occasion. Nous avons pu faire trois matchs de rugby à 5 en salle contre l’équipe d’Esztergom, l’une des toutes meilleures formations du pays chez les jeunes, pour un total de deux courtes défaites et un match nul alors que notre équipe avait à peine plus d’un an d’existence! Par la suite, des joueurs de nos équipes masculines et féminines ont aussi pu participer à des tournois de rugby à sept organisés par ce même club de Tárnok, respectivement en juin et en automne 2019.
Pendant la mi-temps d’un des matchs du mini-tournoi de Tárnok, Février 2019. Photo: Veronika Koncsek
Malheureusement, comme pour tout le monde, notre saison 2019-2020 s’est finie en queue de poisson avec l’arrivée de l’épidémie de Covid-19: l’école a été fermée, les entrainements interrompus et les championnats nationaux scolaires annulés. Cet arrêt abrupt mais bien compréhensible correspondait aussi pour moi à la fin de mon contrat dans l’établissement et donc à la fin de mes fonctions de directeur rugby; même si la probabilité d’un rachat par une pétromonarchie semble relativement peu élevée, j’espère bien que quelqu’un reprendra le flambeau.
Personnellement, je garderai un excellent souvenir de ces trois années: ce fut pour moi une grande joie d’entrainer les élèves, de leur faire découvrir un sport peu connu en Hongrie, de les voir progresser et de voir l’équipe gagner en cohésion et en solidarité. Pour finir, je voudrais dire à toutes les personnes qui m’ont suivi de près ou de loin dans cette aventure, élèves, collègues, personnels de directions, employés de l’établissement, présidents et entraineurs des clubs partenaires un grand:
Köszönöm szépen ! (Merci beaucoup !)
christobal
Bravo, belle aventure!
Le Haut Landais
Merci a toi Adrien pour cet article tres sympa
etutabe
ça fait vraiment du bien de lire des articles rafraichissants comme celui-ci. Merci à vous et bonne continuation dans vos projets personnels et/ou rugbystiques