Colloque en hommage à Nicolas Chauvin : ''Le rugby français est en dépression, il ne tient qu'à nous de changer ça !''
Benoît Larousse (à gauche) a organisé un colloque en hommage à Nicolas Chauvin, à l'Université Paris Descartes.
Journée particulière ce jeudi à l'université Paris Descartes, marquée par l'émotion et la réflexion sur l'avenir du rugby, à l'occasion du colloque en hommage à Nicolas Chauvin.

À l'initiative de Benoît Larousse, entraîneur de Massy en Pro D2, mais également professeur en STAPS à l'Université Paris Descartes, où il a notamment côtoyé Nicolas Chauvin, joueur espoir du Stade Français décédé au mois de décembre, un colloque était organisé pour rendre hommage à ce dernier. Plusieurs personnalités ont répondu à l'appel et ont débattu pendant de longues heures sur le futur du rugby. Parmi les personnes présentes dans cet amphithéâtre, rassemblées autour d'une photo de Nicolas affichée dans un cadre :

Benoît Larousse (coordinateur de la journée), le DTN Didier Retière, des journalistes dont François Trillo (Be Sport et Sud Radio), Bertrand Guillemin (Canal +), mais aussi Alexandre Bardot (L'Equipe), le Dr. Jean-François Chermann (neurologue), Sébastien Dalgalarondo (Sociologue), Joël Dumé (Directeur national de l'arbitrage), Pierre Villepreux (ancien entraîneur du XV de France et du Stade Toulousain), Florian Grill (président de Ligue d'Île-de-France), Jérémy Aicardi (ancien joueur France 7), Benoît Guyot (ancien joueur de Biarritz), Mathieu Blin (ancien joueur et entraîneur professionnel), les membres de la Fédération Française de Rugby, de la Fédération Française du Sport Universitaire, de la Ligue d'Île-deFrance, des dirigeants de différents clubs (notamment du Stade Français Paris et du Racing 92), des entraîneurs, des professeurs, des joueurs, des étudiants, des anciens partenaires de Nicolas Chauvin et surtout, le père, Philippe, qui émettra quelques mots après le discours d'introduction de Benoît Larousse.

Après avoir remercié le directeur de l'UFR Staps à l'Université Paris Descartes, Arnaud Ferry, pour l'accueil, l'entraîneur massicois porta immédiatement un hommage à son ancien élève, racontant notamment une anedocte lors de l'un des nombreux passages de Nicolas sur les bancs de cette université. C'était à l'occasion de l'anniversaire de Benoît au mois de septembre, et les élèves présents ce jour-là dans cet amphithéâtre, dont Nicolas, le lui avait souhaité en chantant. Une émotion grandissante se fit déjà sentir :

La peine a pris place suite à cet événement tragique. Elle a ensuite laissé place à la colère et on a alors cherché des fautifs. La faute, elle est au monde du rugby. Nous sommes tous responsables de notre sport, de World Rugby jusqu'aux joueurs, on doit donc tous se mobiliser pour que ça ne se reproduise plus. Le rugby français est en dépression, il ne tient qu'à nous de changer ça ! 

C'est notamment dans ce cadre-là que Benoît Larousse a invité plusieurs spécialistes à débattre tout au long de la journée autour, entres autres, des axes de réflexions qu'il a décrits d'entrée :

  1. Le rugby est-il plus dangereux qu'avant ?
  2. Le rugby français est-il plus dangereux que les autres ?
  3. Le rugby est-il plus dangereux que les autres sports ? 

Benoît Larousse donna ensuite la parole au père de Nicolas, dont il salua le courage, en appelant à une journée de convivialité.

« La vie est précieuse, elle ne doit pas être jouée... »

Lors de son passage dans les vestiaires du Stade Français à l'occasion du match en hommage à Nicolas, organisé par le club parisien face aux Ospreys, le père de celui-ci, Philippe, avait eu un discours très fort, axé notamment sur le plaisir de pouvoir pratiquer ce sport. Une nouvelle fois, ce maître-mot du plaisir a pris une place non négligeable dans son intervention, ce dernier émettant notamment l'importance de la dimension humaine au sein d'un groupe, le « facteur X » comme il l'a évoqué. Malheureusement, comme l'a rappelé le père de Nicolas, les faits sont là. Quatre morts en moins d'un an... Malgré tout, il garde tout même une lueur d'optimisme :

Pour moi, il n'y a pas de fatalité quand les risques sont soignés. Mais il faut impérativement protéger les joueurs, ce sont eux les principaux acteurs ! Les morts d'Adrien, de Louis, de Nicolas et de Nathan ne doivent pas servir à rien... La mort de mon fils Nicolas, consécutive à une fracture et arrachement d'une partie de la seconde vertèbre cervicale, n'a rien de normal ! La question posée est simple : comment allons-nous éviter que des accidents mortels aient lieu aujourd'hui sur les terrains de rugby ? Tout le monde attend une réponse. La vie est précieuse, elle ne doit pas être jouée...

« Le rugby, ce n'est pas la guerre ! »

En attendant l'arrivée de Pierre Villepreux, bloqué par son train, c'est Marc Deleplace qui introduit le discours d'ouverture, après une vague d'applaudissements rendue à Philippe Chauvin. Son courage fut une nouvelle fois salué par Marc. Ce dernier est le fils de René, initiateur du rugby de mouvement dans les années 70. Une association, dont Marc et Pierre sont les principaux acteurs, a notamment vu le jour grâce à ses travaux : Culture Rugby Mouvement et Témoignage (CRMT). René Deleplace a été entraîneur du PUC, cadre technique de la FFR et également professeur à Descartes, où il a « toujours enseigné un rugby de mouvement », comme a tenu à le rappeler son fils. « Il n'a jamais écarté la dimension physique, mais n'en a pas fait une chose préalable au jeu. Le rugby n'était pas un sport de combat pour lui. » Des pensées que l'on retrouve dans son ouvrage, publié en 1979 : « Rugby de mouvement, rugby total ». 

C'est aux alentours de 11h que Pierre Villepreux pointa alors le bout de son nez. Rentré au Hall of Fame du Rugby en 2018, l'ancien entraîneur du XV de France et du Stade Toulousain est très reconnu dans le monde de l'ovalie pour prôner un rugby de mouvement depuis des années. Aussitôt arrivé, il prit assez rapidement la parole :

Tout le monde a été très touché par les récents décès dans notre sport. Du monde du rugby professionnel au rugby amateur. Aujourd'hui, notre jeu est en difficulté, car le rugby, c'est un sport de contact, certes, mais ce n'est pas la guerre ! Tout part alors des règles que l'on veut mettre en place autour de notre sport, et aujourd'hui, il faut une méthode. C'est essentiel pour se donner une identité et également mettre en place un jeu qui pérenne avec le temps. Pour cela, il faut du savoir et de la connaissance. Mais en France, on a souvent des querelles sur les codes du rugby, car il y a deux écoles. Tout d'abord, il y a le travail sur la technicité et sur la dimension physique. La première caractéristique est notamment souvent remise en question lors des mauvais résultats. Le problème, c'est que l'on n'a pas associé les deux ! On a notamment ce défaut à l'école de rugby où le principal but est de mettre sur le cul l'adversaire. Pour moi, ce premier logiciel à faire perdre au rugby son identité. » 

Il enchaîna ensuite sur l'autre méthode : « Pour moi, il y a un autre logiciel à remettre en marche et il passe par plusieurs points. Le premier, ça serait de donner la priorité au mouvement général, c'est-à-dire : avancer, proposer, soutenir. Le deuxième, c'est favoriser le jeu au debout, qui doit être bien supérieur au jeu au sol. Et le troisième, le plus important, c'est de donner du sens au jeu. Le joueur doit savoir pourquoi et quand : jouer au pied, jouer à la main ou affronter. Pour cela, il faut former des joueurs créatifs et adaptatifs, mais aussi faire le pari de leur donner une plus grande liberté d'initiative, pour qu'ils sachent comment passer du connu à l'imprévu. Cela permettra notamment une plus grande polyvalence de la part des joueurs, et ça, il faudra l'enseigner à tout âge. Ce qui est sûr, c'est que, si le rugby de mouvement prend le dessus, les affrontements corps à corps deviendront acceptables. Rajoutant tout de même un bémol sur les règles : « Peut-être qu'il faut changer les règles. Pour moi, le rugby d'aujourd'hui est modifiable. Mais au-delà de changer celles-ci, il faut surtout penser à ne pas dénaturer le jeu... »

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Hormis le contexte émotionnel de ce colloque,le deuxième exposé de Pierre Villepreux doit être la seule route à suivre pour sauver le Jeu de rugby;

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