Quoi de mieux qu’un Crunch face aux Anglaises pour terminer le Tournoi des 6 Nations pour les joueuses du XV de France ? Une rencontre dans laquelle on promettait l’enfer aux Tricolores face à une des meilleures équipes de rugby de tout le temps, dans son antre de Twickenham.
Pour rappel, les joueuses du XV de la Rose n’ont plus perdu une seule rencontre depuis la finale de la Coupe du monde en 2022. Un match où les Anglaises s’étaient inclinées en jouant à 14 contre la Nouvelle-Zélande. Cette formidable série de victoires s’illustre notamment à travers le Tournoi des 6 Nations, remporté pour la septième fois d’affilée par les coéquipières d’Abby Dow (en comptant cette édition).
Mais tout ne fut pas rose ce samedi pour l’Angleterre, malgré une entame sur les chapeaux de roues, avec 5 essais inscrits en plus de vingt minutes, portant le score à 31-7 à la 23e minute. Un début de match où les Françaises semblaient totalement dépassées par le rythme et la vitesse d’exécution imposés par les Anglaises, comme en témoigne le carton jaune infligé à la pilier droit Assia Khalfaoui. Pourtant, les Bleues se sont accrochées et ont fait douter leurs adversaires du jour jusqu’à la dernière minute, grâce à une stratégie bien spécifique.
Un défi dans l’axe
Si on connaît les aptitudes et les qualités des joueuses britanniques sur les phases de conquêtes, plus particulièrement les mauls après les touches. Gaëlle Mignot et son staff ont décidé de défier les Anglaises au centre du terrain, avec des relais dans l’axe. Des picks and go réalisés avec beaucoup de vitesse, qui ont permis aux Tricolores de jouer après contact et de mettre en difficulté cette équipe, très bien organisée défensivement.
Une stratégie qui a mis en avant les Bleues les plus puissantes, comme les sœurs Feleu ou Manon Bigot, très à l’aise ballon en main et dominantes sur les premiers contacts. C’est d’ailleurs grâce à ce plan de jeu que les Françaises ont inscrit leur premier essai, ouvrant la brèche à leur demi d’ouverture Carla Arbez.
Une tactique qui a obligé les Anglaises à s’adapter en se resserrant autour des rucks pour moins subir les premières collisions et empêcher les Françaises de mettre de l’avancée. Sauf que ce changement a libéré des intervalles pour les trois-quarts ailes tricolores, qui ont bénéficié de plus d’espaces pour jouer leur duel. Il n’en fallait pas plus pour la Bordelaise Joanna Grisez et la Toulousaine Kelly Arbey pour s’illustrer, en réalisant d’incroyables numéros de solistes. Des actions qui ont permis à la France de recoller au score et de concrétiser les temps forts de leur équipe.
Cette stratégie axiale a donc perturbé cette équipe anglaise, pourtant intraitable en première mi-temps. Nul doute que le staff des Bleues s’appuiera sur ce point pour le prochain mondial à venir.
Intensité physique et mauls
Il y a eu des longues phases de jeu de part et d’autre de ce match éprouvant, tant par la pression défensive mise par les Bleues, récompensées par l’essai de la demi de mêlée Pauline Bourdon-Sansus suite à la bévue de la numéro 10 Zoe Harrison. Une action qui prouve l’implication défensive des Françaises (après les 20 premières minutes), qui ont réussi à faire déjouer d’excellentes joueuses anglaises.
Il est toujours utile de rappeler que les joueuses du XV de la Rose évoluent dans un système professionnel, contrairement aux Bleues qui sont encore dans un système semi-professionnel. Ce qui ajoute encore plus de mérite à la performance de ce week-end. Cette différence s’est notamment illustrée dans le secteur de la touche.
Les coéquipières de la capitaine Zoe Aldcroft (élue joueuse du match), ont été dominatrices dans les airs avec de nombreux contres qui ont perturbé les lancements adverses. Mais surtout au sol, en multipliant les mauls, avec une dynamique qui s’enclenchait très rapidement. Même si les Françaises connaissaient ce point fort de leurs adversaires, elles ont subi cette phase de jeu tout en laissant beaucoup d’énergie.
Ce match intense n’a donné lieu qu’à très peu de temps morts, grâce au mental des Françaises pour revenir au score, alors qu’elles avaient encaissé plus de 30 points en 20 minutes. Se donnant même l’occasion d’avoir une dernière balle de match, qui s’est finalement transformée en un en-avant après une erreur sur la réception de l’ultime coup d’envoi.
Vitesse et précision pour le XV de la Rose
La belle performance des Tricolores se ressent d’autant plus qu’elles ont affronté des Anglaises capables d’afficher un niveau très élevé par période, menées par la métronome Zoe Harrison en 10. La joueuse des Saracens a parfaitement su alterner entre les différentes phases de jeu. Elle s’est montrée décisive par son jeu au pied, mais surtout par sa vision, en servant dans les espaces libres ses coéquipières.
Une performance due à la domination de ses avants et aux qualités d’un triangle arrière absolument redoutable. Entre l’arrière Emma Sing et Abby Dow, toutes les deux récompensées par un doublé, chaque erreur de placement des arrières françaises fut sanctionnée par la vitesse et les qualités individuelles de ces joueuses.
Les coéquipières de Morgane Bourgeois ont concédé trop de franchissements face à une équipe aussi bien rodée, capable d’exploiter le moindre espace. Si l’on ajoute les libérations très rapides dans les rucks, les Bleues se sont laissé déborder dans une entame de match où elles n’ont pas montré leur meilleur visage.
Une revanche au mondial ?
Ce Crunch peut déjà être considéré comme un des plus beaux matchs de l’année, mêlant suspense, intensité et un scénario fou. Une rencontre d’un très haut niveau entre deux équipes proposant diverses stratégies pour dominer leurs adversaires. Même si le pragmatisme et l’organisation du XV de la Rose ont fait la différence face à de valeureuses Françaises capables de réaliser des exploits individuels. Cette opposition laisse présager le meilleur pour la prochaine coupe du monde qui débutera le 22 août 2025. D’autant plus que les deux nations pourraient se retrouver en demi-finale si elles finissent premières de leur poule.
L’Angleterre et la France feront à coup sûr partie des favoris pour cette compétition, sans oublier les tenantes du titre néo-zélandaises, renforcées par le retour de la légendaire Portia Woodman. La joueuse des Black Ferns sort de sa retraite pour tenter de conquérir un nouveau titre, dans un palmarès déjà bien fourni.
mimi12
Ça nous promet une belle coupe du monde entre nos « meilleures ennemies» de la Rose et les Neo-Zélandaises...
pascalbulroland
Merci pour ces belles analyses...