DOSSIER. À la découverte de la Bundesliga et du rugby allemand
Que représente le rugby dans la société allemande, en comparaison avec d’autres sports ?
Le rugby a été et est encore aujourd’hui un sport marginal en Allemagne. Il est en croissance, nous sommes le sport olympique dont le nombre de licenciés a le plus augmenté l’an passé, mais si l’on regarde les chiffres dans l’absolu, nous restons un sport marginal. Cela devrait continuer dans les prochaines années, mais il devient de plus en plus important, surtout depuis un an et demi. Mais si vous regardez le paysage sportif allemand aujourd’hui, le football écrase tout. La Fédération Allemande de Football (DFB) compte aujourd’hui 6,8 millions de licenciés, nous environ 15 000. Même les autres grands sports comme le handball, le basketball ou le hockey viennent nettement après le football.
Est-ce que le rugby a pour objectif d'avoir plus de licenciés que ces disciplines ?
Bien sûr que c’est un objectif. Nous voulons augmenter notre nombre de licenciés, mais il faut rester réaliste, cela va prendre plusieurs années pour atteindre le niveau du handball ou du basketball, la différence est pour l’instant trop grande.
Les Allemands sont-ils intéressés par le rugby ?
Oui c’est certain. Nous l’avons remarqué à la Coupe du Monde 2015 et même après. Quand les gens sont entrés en contact avec le rugby, un très grand intérêt s’en est suivi. Le nombre de téléspectateurs pour les championnats d’Europe de rugby l’ont montré, c’était la première fois que du rugby était retransmis par des chaînes publiques. Pareil avec les tests de novembre contre le Brésil et l’Uruguay, il y a eu une très bonne réception chez le public.VIDEO. L'Allemagne bat l'Uruguay dans les derniers instants pour une victoire historique
Quels sont les objectifs de la Deutsches Rugby Verband ?
Nous avons d’abord un objectif de croissance. Je l’ai déjà évoqué, mais nous avons besoin de plus de licenciés, de plus de joueurs également pour atteindre nos différents objectifs sportifs. Ils sont très hauts, il faut l’avouer. Le premier d’entre eux est de participer à une Coupe du Monde à XV, en 2019 au Japon, même si cet objectif est extrêmement ambitieux. Sinon il faudra y être en 2023, peut-être en France (rires). Pour l’équipe à 7, les objectifs ne vont pas aussi loin. Nous voulons nous qualifier pour les Sevens World Series, nous n’étions pas loin cette année à Hong Kong où nous avons perdu d’un fil contre l’Espagne en finale des qualifications. L’autre objectif est de se qualifier aux Jeux olympiques de 2020 à Tokyo. Nous avons raté la qualification à la Coupe du Monde 2018 à San Francisco, mais nous avons dirigés nos objectifs vers 2020.VIDEO. Rugby Europe Championship - L'Allemagne s'offre un succès historique sur la Roumanie (41-38)
Et pensez-vous que ces objectifs sont réalisables pour 2019 et 2020 ?
Oui, nous fixons des objectifs qui nous paraissent atteignables. La qualification aux Jeux olympiques est clairement possible pour l’équipe à 7, et nous avons encore une chance de nous qualifier pour 2019 avec l’équipe à XV et cela demandera beaucoup d’efforts. Mais nous y travaillons, si nous n’y arrivons pas, ce ne sera pas dramatique, mais l’objectif reste le même.
Le gouvernement allemand soutient davantage le rugby à 7 que le XV. Est-ce une priorité aussi pour la DRV, au détriment du XV ?
C’est vrai que nous ne recevons pas d’aide de l’Etat pour le rugby à XV. Depuis que le rugby est un sport olympique, toutes les aides que nous recevions, ce qui n’était pas beaucoup, ont été arrêtées et une très grosse subvention a été destinée au rugby à 7, parce que c’est un sport olympique. Mais ce n’est pas pareil pour nous, c’est simplement une norme européenne : c’est la même chose pour les Suisses, les Italiens ou les Suédois, c’est partout pareil : il y a peu de subventions pour le rugby à XV, mais plus pour les sports olympiques. Klaus Blank, président de la Fédération Allemande de Rugby.
Mais les objectifs de la DRV ne sont pas focalisés sur le rugby à 7 ?
Non, non, pas du tout. Les racines du rugby en Allemagne viennent du rugby à XV et on ne va pas le délaisser pour le rugby à 7. Il faut parfois revoir les priorités en cours de saison, la faute au calendrier, mais ça ne change rien aux lignes directrices générales. Pour nous, les deux sont tout aussi importants.
Beaucoup de joueurs étrangers, qui ont un parent ou un grand-parent allemand, jouent pour l’équipe d’Allemagne. Comment mettez-vous en place cette politique sportive ?
Oui c’est effectivement une politique à double-tranchant. D’un côté, il faut veiller à ne pas oublier nos jeunes talents, et nous le faisons. Nous menons cette politique aujourd’hui pour élever le niveau du rugby en Allemagne et aussi pour avoir une équipe nationale très vite performante. Nous sommes conscients que ce modèle n’est pas durable, mais il faut d’abord avoir des joueurs de bon niveau, une équipe nationale performante pour attirer des sponsors et cela crée dans tous les cas un effet d’entraînement pour les jeunes joueurs allemands qui arrivent. Les étrangers qui viennent jouer dans notre championnat élèvent également le niveau de jeu, et les joueurs de Bundesliga doivent donc se préparer pour faire jeu égal. Le niveau reste assez éloigné de ceux des nations traditionnelles comme la France ou la Grande-Bretagne, nous le savons, mais il faut commencer comme ça et aller dans la bonne direction.L'Allemagne, le 6 Nations B, le circuit 7s et son passé à La Rochelle : Harris Aounallah se dévoile
Comment décririez-vous les relations entre la DRV et la Wild Rugby Academy (l’académie créée par Hans-Peter Wild, vue comme le « Marcoussis allemand ») ? Que pensez-vous de son apport au rugby allemand ?
Nous avons un contrat de sponsoring et avec cela il subventionne beaucoup notre équipe de rugby à XV. Il faut avouer simplement que sans son soutien, le rugby à XV n’aurait jamais pu atteindre ce niveau ici. C’est certain et nous sommes très reconnaissants de tout ce qu’il a investi dans le rugby ces dernières années. Nous avons eu récemment des discussions pour poursuivre notre partenariat, il reste encore quelques points à régler, je ne pourrai donc pas en dire plus pour le moment. Le contrat arrive à son terme et nous faisons en sorte qu’il se prolonge. Les moyens économiques et humains qui sont investis sont énormes et encore une fois, sans toutes ces aides, nous n’aurions jamais eu ce niveau, c’est certain.
Pensez-vous que le rugby allemand peut profiter du rachat du Stade Français par M. Wild ?
Je pense vraiment, et j’en ai parlé avec Doctor Wild, que cela devrait créer un effet de synergie. En ce qui concerne la formation par exemple : je ne pense pas que de nombreux joueurs allemands vont jouer pour le Stade Français parce que la différence de niveau est encore trop élevée, mais on pourrait partager des structures d’entraînement, mettre en place des échanges d’entraîneurs et de personnels, ce sont des idées que nous avons, mais c’est encore nouveau et il faut d’abord voir comment tout va évoluer. Mais le DRV pourra très certainement en profiter.Top 14 - Hans-Peter Wild dévoile le nouveau projet du Stade Français
Pas encore de projets concrets donc ?
Non, pas encore de plans concrets car c’est encore trop récent, M. Mohr (ancien joueur de La Rochelle et directeur sportif de la Wild Academy, ndlr.) travaille beaucoup pour cela actuellement en tant que directeur sportif du Stade Français, je pense qu’il y a encore certains points techniques à régler mais je ne suis pas informé de tout ça, mais ce qui va se mettre en place se développera très certainement à l’automne.
Le rugby allemand a-t-il un modèle étranger ? Peut-il s’inspirer du rugby français, britannique ou néo-zélandais par exemple ?
Nous n’avons pas de modèle direct car il n’y a pas un modèle que nous pourrions copier. Partout dans le monde, il existe différentes façons de travailler ou de percevoir les choses, et il faut toujours se demander comment cela fonctionne, pourquoi est-ce que telle décision est prise dans tel pays, et après il faut essayer de l’adapter. Il y a une chose dont on s’est inspiré, c’est le modèle des académies, qui vient d’Afrique du Sud, amené par Paul Wilhelm Bosch, mais nous ne l’avons pas copié tel quel, nous l’avons adapté en fonction de nos possibilités et de nos structures. De la même manière, nous avons visité Marcoussis pour voir comment ça fonctionne, voir comment nous en inspirer, nous sommes toujours en recherche d’améliorations, mais encore une fois, faire un copier-coller, ça ne donne rien.
Dodow
Si ce pays avec quelques autres gagnaient un peu en niveau, on pourrait peut être se faire une coupe du monde à 24 sans trop d'hétérogénéité dans les niveaux 🙂
Ahma
Le joueur en bleu, sur la photo, fout encore plus les jetons que Bakkies Botha.
mimi12
Article intéressant !