Ancien gymnaste et passionné de sport, Anthony rejoint la Fédération Française de Rugby en 2012 pour un poste de préparateur physique. « J’ai eu l’opportunité de réaliser un cursus universitaire en STAPS, orienté vers la préparation physique. Je suis en charge de la préparation physique de l’Équipe de France Féminine de Rugby à 7 avec laquelle j’ai pu vivre différentes compétitions majeures à savoir : 5 Championnats du Monde, 7 Championnats d’Europe, 2 Coupes du Monde et une Olympiade (JO de Rio en 2016, ndlr.) ». Il a aussi un attachement fort à la cellule accompagnement à la performance, depuis l’obtention d’une thèse en physiologie du sport en 2016, sur l’analyse de la performance en rugby à 7.
Aujourd'hui, l’intérêt du préparateur physique se tourne vers « l’analyse des exigences de la tâche pour améliorer les formats de préparation physique ». En ce sens, ce qui retient son attention dans la perspective d’améliorer les performances individuelles des joueuses et joueurs de rugby sont les méthodologies de « la manipulation des données GPS, les entraînements à haute intensité ainsi que le stress environnemental », explique Anthony.
"Les joueuses et joueurs peuvent parcourir jusqu’à 20kms en un week-end, pour s’avaler cela, il faut être prêt, impossible de s’échapper ou de se planquer sur le terrain."
Avant de rentrer dans le vif du sujet sur la préparation physique, il est bon de rappeler la différence en le rugby à XV et le rugby à 7. Car oui, il s'agit bien de deux disciplines très différentes. Le fait de se partager le même terrain avec deux fois moins de joueurs, rend le rugby à 7 bien plus exigeant que le XV. Relativisé au temps de jeu, tout y est exacerbé. Dans un premier temps sur le plan physique : « il y a plus de distance parcourue et surtout, il y a plus de courses à haute (>Vitesse Maximale Aérobie) et très haute intensité (>85% Vmax) couplées à un nombre d’accélérations aussi plus important ». Sur le plan technique : « il y a plus de passes, plus de plaquages, plus de rucks , ce qui rend le 7 bien plus exigeant que le XV », souligne-t-il.
"La saison est rythmée par l’enchaînement des tournois du circuit mondial, période de préparation au CNR et stage à l’extérieur"
Une saison de rugby à 7 se déroule chaque année de la même façon « le circuit mondial World Series (8 tournois chez les filles et 10 chez les garçons), le championnat d’Europe a toujours sa place en fin de saison. La seule particularité de cette saison olympique pour les filles et les garçons du 7, sera la présence du TQO mondial (car nous n’avons pu nous qualifier la saison précédente), dernière chance de finir la saison aux Jeux olympiques de Tokyo fin juillet, début août 2020. » Sachant que la saison est rythmée par « l’enchaînement des tournois et par des périodes de préparation au CNR mais aussi en stage à l’extérieur ; ces derniers sont souvent mis en place pour aller chercher des conditions météo plus clémentes que celles offertes par Paris en plein hiver, de façon à mieux se préparer aux conditions de la compétition. »
Quid de la préparation et de la charge de travail lors de la pré-saison ?
La charge d’entraînement effectuée en pré-saison, a pour but de poser les bases du socle aérobie indispensable pour supporter les futures charges de travail à haute et très intensité, qui font l’essence du rugby à 7. Ces charges d’entraînement deviennent conséquentes, car c’est le moment privilégié pour (re) travailler sur le renforcement musculaire de base, (re) faire le point sur les postures, faire un focus sur tout le travail préventif de type prophylaxie (prévention des blessures) tout en pensant beaucoup de temps sur le terrain.
Ensuite, il démontre que les séances de préparation physique courues, intégrées au rugby, ont pour objectif « de parcourir un maximum de distance à haute intensité (> à la vitesse maximale aérobie (VMA), de façon individualisée) ». Il souligne également l’intérêt d'une bonne préparation physique générale (souvent appelé PPG) car « elle ne réduit pas le risque de blessure lié aux collisions, qui prennent une place prépondérante en rugby à XV, autant que chez nous en rugby à 7 ». Mais pour réduire le risque de blessure sur la saison, s’entraîner plus dur qu'en match leur paraît être la bonne méthode.
"Le travail collectif du staff (entraîneurs, kiné, préparateurs physiques) et les échanges nombreux avec les joueuses, nous permettent d’appréhender les grandes compétitions"
Comme vous avez pu le constater lors des tournois de rugby à 7, une équipe peut être en forme mais peut aussi avoir des baisses de régime. Anthony explique comment lui et ses collègues déterminent les pics de forme durant une saison et s'il était collectif ou individuel : « Un pic de forme collectif…C’est un vrai casse-tête ! Nous sommes dans une production de performance collective, qui doit être générée par différentes individualités. C’est très difficile à mesurer ». Il met aussi en avant le travail collectif, ainsi que les nombreux échanges entre le staff (préparateur physique, kinés) et les joueuses qui permettent d'appréhender les grandes compétitions, dans de bons états de forme pour réaliser de grandes choses collectivement. « Nous pensons que cela a été le cas par exemple lors de la dernière coupe du monde à 7 à San Francisco 2018 (ou l’équipe féminine a été sacrée vice-championne du monde, ndlr.). Les stratégies d’affûtage en rugby à 7 nous aident dans la recherche de ces fameux pics de forme, pour performer le mieux possible le jour J. » Il conclut en disant que durant une saison, les filles passent par différent paliers, c'est-à-dire que « les rythmes de chacune peuvent varier en fonction de leur participation ou non aux tournois du circuit mondial et aussi à cause de blessure. Une évaluation en continue est nécessaire pour accompagner les filles dans leur recherche de performance. ».
Lors des différentes étapes du World Sevens Series, les filles sont confrontées à de gros décalages horaires. Pour que celui-ci soit plus facile à digérer des choses ont été mises en place. « Pendant longtemps nous avons tenté de prendre en charge un maximum d’éléments pour que les filles puissent gérer et appréhender de la meilleure des façons, la gestion des décalages horaires : pré-décalage à J-3, J-2 et J-1, gestion des phases de sommeil pendant le transfert, utilisation de lumière bleue et exposition à la lumière du jour le plus rapidement possible. » Hors, ils se sont rendu compte qu’il était souvent difficile d’organiser tout ça et que parfois, le stress occasionné portait plus de préjudices que d’avantages. Ainsi, ils conseillent toujours les filles sur les bonnes pratiques. Cependant, leur expérience personnelle prime sur les choix effectués.
Les déplacements en compétition s’effectuent le plus souvent possible sur la base « d’un jour égale une heure » : par exemple, sur un décalage horaire de 9h, la fédération s’organise pour nous faire partir au moins 9 jours à l’avance ; ceci représente un véritable coût budgétaire, mais reste l’élément le plus important pour gérer les décalages horaires. A cela, s’ajoute les stratégies de gestion de contenu et de charge d’entraînement, les 2 à 4 premiers jours sur place, pour s’éviter tous couacs qui mettraient en péril la participation d’une joueuse au tournoi suivant.
En conclusion, nous pouvons dire que le rugby à 7 est un sport que l'on peut qualifier d’extrême mais également très complet en raison de la répétition des tâches (entre 115 à 170 par match) et au temps de jeu effectif dans une rencontre : 8 à 9 minutes sur un match de 14 minutes (environ 60 % du temps global contre 50 % en rugby à XV).
spir
Très chouette article, et bien intéressant, merci !
LaGuiguille
il me semblait que pour etre qualifier sport extreme, il fallait avant tout avoir des tenues tres colorées, voire fluos ?
spir
Et porter des lunettes de soleil miroirs.
Tolosus Brennus
Et être sponsorisé par RedBull
spir
Et être singulièrement égocentré'e...
lelinzhou
Chouette, un article rugby !
Yonolan
sport extrême je ne sais pas
C'est très dur oui mais comme par exemple la course en vélo sur piste où tu as les muscles des jambes submergés d'acide lactique
Et avec peu de temps aussi entre les courses
Est-ce un spot extrême pour autant ?
Vae Victis Brennos
Je connais moins le cyclisme sur piste, mais...
- Existe-il autant de compétitions sur une saison (10 étapes, plus un gros tournoi (CDM, JO, TQO)) ? En plus des plus petits tournois (prépa, circuit européen)
- Quel rythme d'enchainement (décalage horaire, 1 tournoi sur 2 avec une seule de semaine de récupération)
- Combien de courses pour sur une compétition de cyclisme ?
- Il faut également prendre en compte les phases de combats sur le sept : plaquer, gratter, pousser, sauter, se relever, crocheter est extrêmement énergivore.
- Il y'a également une idée de s'arrêter, repartir, relancer etc. qui est extrêmement usante (mais encore une fois je ne suis pas un expert en cyclisme sur piste). On le voit bien sur le cyclisme sur route par exemple : un coureur s'échappe, il est suivi difficilement, si il parvient à ralentir puis a relancer brusquement, il a peu de chance de garder le suivant dans sa roue.
- Enfin, et je crois le coté le plus important et c'est en ce sens que je dirais que c'est un sport vraiment extrêmement, c'est que c'est un sport ultra complet physiquement, parce qu'il est, en plus d'être un bon compromis endurance/VMA, extrêmement complet dans ses sollicitations musculaire.
Yonolan
J'ai pris cet exemple du vélo juste pour dire qu'il existe des sports ou votre organisme est mis à très rude épreuve ( et que dire des décathloniennes par exemple)
Mais pour autant il n'y a pas de définition officielle du sport extrême mais un constance semble être depuis les origines de ce terme le fait d'un risque majeur d’intégrité physique voir de mort en cas d'erreur ; le pendant peut-être à la recherche d'adrénaline
Vae Victis Brennos
Tout à fait. Là c'est plutôt extreme pour le corps qui est mis à rude épreuve dans son intégralité.