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L'éternelle question : le rugby, sport d'intellos ou de bourrins ?
Le rugby, un sport de copains avant tout.
Pierre Navarron se demande cette semaine si le rugby est un sport d'intellos ou de bourrins ? À moins qu'il ne soit un sport d'intellos jouer par des bourrins.

Le rugby est-il un sport d'intellos qui est la mythologie des philosophes ? Ou un rassemblement de gros bourrins juste bon à se balader braillards et à moitié ivres, torses nus en short et chaussettes de rugbymen déclassés tout l'été aux fêtes de Bayonne ou de Dax ? Vu par ses détracteurs, le rugby est considéré comme trivial. Un sport fait de fureur et de combat où l'impact est de plus en plus rude voire même dangereux. Ce qui dans notre monde aseptisé va bientôt devenir la pensée "woke" et sportive du mâle blanc dominant. Qui plus est, les règles de notre jeu sont complexes. Forcément, ce sport ne peut intéresser qu'une bande d'initiés, franc-maçonnerie de l'ovale, qui ne se reconnaît que dans l'adoubement d'un jeu qui se pratique avec un ballon ovale. Forme particulière aux rebonds malicieux, voire malencontreux alors que la majorité des amateurs de jeux de ballons de notre univers ne trouvent leur bonheur simple qu'avec un ballon rond : foot, basket, handball, volley...

Cet entre-soi ovale implique l'acceptation de codes et de valeurs autrefois reconnues et portées au pinacle, aujourd'hui quelque peu galvaudées, mais qui sont toujours les marqueurs de notre sport roi. Dont les intellectuels ont saisi l'esprit particulier et l'éthique guerrière. De toute façon, quoi de plus philosophique que cette idée de faire avancer son équipe en faisant des passes vers l'arrière, tout en offrant son corps à la mitraille des défenses adverses. Il faut avouer qu'aucun général féru de stratégie n'avait anticipé cette simple règle inventée par un étudiant anglais facétieux et empêcheur de tourner en rond. Pour lui, le monde était ovale ou n'était pas. Et tout est parti de là. Autrefois nombre de joueurs de rugby étaient diplômés, médecins, avocats, ingénieurs. Avec le professionnalisme cela s'est raréfié. Aujourd'hui, peu de joueurs vont au-delà d'un Bac +2 et la tendance à venir n'est pas à l'amélioration.   

On reprochera toujours au rugby ses excès de troisième mi-temps. Quand l'alcool aidant, l'effet de groupe, les restes d'adrénaline pas totalement évacués, font que ces jeunes gens sachant se maîtriser sur un terrain, face à l'adversité, aux lazzis des supporters et devant un arbitre au sifflet parfois intempestif, deviennent de grosses brutes avinées, un peu cons, très bêtes et dont la cervelle est restée au fond d'un vestiaire encore nimbé des brumes de la douche réparatrice.

Le philosophe Michel Serres et Daniel Herrero, sûrement le plus philosophe de nos rugbymen, avaient débattu dans un entretien croisé pour le journal L'Humanité en juin 2020 sur l'âme du rugby. La conclusion de Michel Serres était que "le rugby est un bon cas pour lire le monde moderne". Ce qui laisse augurer de nombreux soubresauts et sûrement encore de nombreux changements à venir, allant ou non dans le bon sens, entre radicalité et conservatisme. Daniel Herrero conclut, lui, en affirmant que : "Le rugby est un jeu existentiel. Or le spectacle remet un peu en cause cet existentialisme". Ce qui ne présage pas vraiment que l'essence même de notre jeu sera respectée et que ce dernier sera toujours l'unique maître de son destin. Il va falloir que Sartre remette ses mains sales dans le cambouis du moteur ovale...

Le rugby est peut-être en fin de compte un sport d'intellos joué par des bourrins. Même si je crois que la mythologie de ses protagonistes, si loin du mythe de Sisyphe, ne sont que les figures humaines de nos héros aux forces surnaturelles. Telle la légende de Chabal créée par le Dieu Youtube et la pilosité de barbe noire... De toute façon, Shakespeare a résumé cette question dans une seule tirade, aussi abscons soit-elle : "To be or not to be, that is the question" et personne n'a encore répondu...

Pierre Navarron travaille dans le consulting après avoir longuement exercé dans le domaine de l'assurance et de la gestion de patrimoine. Parallèlement à cette vie professionnelle, en 2005 il est devenu éducateur en cadet puis dirigeant à l'association Aviron Bayonnais. Il s'occupe plus particulièrement de l'équipe espoirs depuis 2014. Auparavant, presque dans une autre vie, il a été joueur, forcément dans son club de coeur, l'Aviron Bayonnais (1973-1987), puis à l'US Mouguerre (1987-1994) et au Boucau-Tarnos Stade (1994-1996).

"J'aime raconter le rugby, celui que j'ai connu, celui que j'imagine et celui que l'on voit.J'aime les histoires que ce ballon ovale nous donne avec ses rebonds de traviole, ses rires, ses chants et son folklore qui n'appartient qu'à lui et qu'on a tous dans le cœur.Je pourrai vous narrer les envolées de ces grands joueurs que j'ai croisé sur un terrain, comme toutes celles de tous ces anonymes, juste connu dans leurs villages, mais qui faisaient chanter la gonfle comme personne, je pourrai vous confier les débuts de ces rugbymen du top 14 d'aujourd'hui qui portaient déjà les espoirs, devenus nos certitudes contemporaines et qu'ils nous montrent, dorénavant, chaque week-end...Peut-être qu'un jour j'écrirai tout cela..."

Merci à Pierre Navarron pour cet article ! Vous pouvez vous aussi nous soumettre des textes, pour ce faire, contactez-nous !

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  • to7
    16852 points
  • il y a 3 ans

j'avais coutume de dire que personne d'assez intelligent pour comprendre le rugby n'est assez bête pour y jouer
et venant d'un deuxième ou troisième ligne ça faisait souvent sourire les arbitres

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