Soheyl Jaoudat : ‘’Si la Ligue se débrouille correctement, le championnat américain pourrait devenir vraiment fou’’
Soheyl Jaoudat a participé à toutes les rencontres d'Austin en championnat. Crédit photo : Norma Salina.
L’arrière Soheyl Jaoudat a bouclé sa saison avec Austin en MLR. Troisième épisode de notre série ‘’sur la route de Jaoudat’’ avec défaites, Mathieu Bastareaud, décalage horaire et draft au programme.

Soheyl Jaoudat : ''Aux États-Unis, tout est gigantesque ; sur le terrain, ça tape vraiment fort''Soheyl Jaoudat : ''Aux États-Unis, tout est gigantesque ; sur le terrain, ça tape vraiment fort''

0 succès en championnat

Gagner aucun match dans la saison, ça ne m’était jamais arrivé. Je pense, avec du recul, que tout s’est joué assez vite : ça a mal commencé et ça a perduré. On débute la pré-saison avec treize joueurs à cause des visas notamment, des types arrivent toutes les semaines… Déjà, il est compliqué de se préparer correctement dans ces conditions. Le plan de jeu ensuite n’a pas pris. Et puis sur le terrain, on perd des matchs d’un rien : le premier du championnat à la dernière action, le deuxième à la 78e… C’est bête à dire mais ça nous a mis dedans d’entrée et on s’est mis au fond du seau. D’abord, tu perds la confiance en tant qu’équipe. Et l’adversaire le ressent. Aux USA, en général ils ne prennent pas les points même face aux poteaux. Mais là, c’était décuplé, contre nous ça prenait la mêlée ou ça jouait à la main dans nos 22. Donc, en effet, c’est bizarre de ne pas gagner un seul match mais hormis San Diego, que j’ai trouvé au-dessus (NDLR : finaliste, défait par Seattle), on a accroché tout le monde tout en payant cher nos passages à vide en cours de rencontre et c’est logique.

Pas de descente

Ce système est un peu particulier quand on vient de France où ça rythme les saisons, ajoutant de la pression. Mais finalement on n’y pense pas forcément. Pour ma part, j’ai reçu l’éducation ‘’pénalité, tu prends les points’’, c’est simple. Pas eux, ils veulent mettre du jeu de partout, dans tous les sens et le fait qu’il n’y ait pas de descente a une conséquence d’autant plus importante sur cette perception de la discipline. On sortait des matchs, le président ne nous engueulait pas, les Américains sont toujours très positifs. Et je ne suis pas vraiment d’accord avec ça même si ça a du bon. Il faut être capable de se remettre en question et être toujours positif ne le permet pas. Quand tu perds, tout le monde est en cause : les joueurs, les coachs, même les dirigeants. Aux États-Unis, tu peux avoir pris 30, 40 points et un mec qui a fait un bon match individuellement, il sort en rigolant. La victoire n’est pas une fin en soi et nous les Français on ne fonctionne pas du tout comme ça.

Une expérience tout de même réussie ?

Malgré les défaites à répétition, je suis quand même super content. C’est même la première fois que je joue autant : je n’ai manqué aucune rencontre avec quasiment 1000 minutes de jeu au compteur. Je termine meilleur marqueur d’Austin avec quatre essais ; une fois joueur de la rencontre, une autre fois dans le XV de la semaine. Ce sont seulement des stats, il est vrai, mais ça fait plaisir. J’ai principalement joué à l’arrière mais j’ai aussi dépanné un peu partout, à l’aile, en neuf et même en dix lors de la dernière journée.

Quel regard sur le championnat ?

Si on devait comparer la MLR à la France, le haut du tableau soit Seattle, San Diego… ça pourrait titiller du haut de tableau de Fédérale 1 voire du bas de tableau PRO D2, honnêtement. Mais le jeu est vraiment différent, c’est du super rugby, pas ‘’conquête-buteur’’ comme chez nous. Il y a d’excellents joueurs aux USA, des joueurs que tu écoutes sur le terrain comme Pietersen, Foden, Kolonisau, Ravuvou, les frères Suniola ou Manoa. Si la Ligue se débrouille correctement, ça pourrait être un truc de fou dans quelques années. Je pense que l’engouement commence vraiment à prendre et notamment au niveau de certaines franchises : à Seattle, il y avait plus de 8000 personnes au stade, 4000 à Utah, 3000 à San Diego…

L’arrivée de Bastareaud à New-York

Bastareaud, les joueurs de la Ligue le connaissent (à l’inverse de nombreux autres grands noms d’ailleurs) et trouvent ça énorme. C’est génial pour le championnat, au niveau des retombées financières et en termes de communication surtout. Sur le terrain, il va marcher sur tout le monde. Ça en serait même dangereux ? J’ai écouté l’interview de Hamilton. Les gars aux USA commencent à être préparés, certains vont faire la coupe du Monde. J’ai des coéquipiers canadiens à Austin qui vont jouer l’Afrique du Sud et la Nouvelle-Zélande en poules. Donc je ne suis pas tout à fait d’accord, les joueurs sont vraiment massifs, c’est plutôt techniquement que c’est compliqué. Alors oui, Bastareaud va casser des plaquages dans tous les sens, la défense n’étant pas en plus le point fort de la Ligue mais ses adversaires vont s’envoyer. S’il faut défendre à trois, ils le feront.

Jim Hamilton s'inquiète pour les adversaires de Mathieu Bastareaud aux Etats-UnisJim Hamilton s'inquiète pour les adversaires de Mathieu Bastareaud aux Etats-Unis

Ça change de Brive en bus…

Un truc qui m’a assez marqué, ce sont les déplacements de fou. Quand tu es à Austin et que tu vas jouer à Seattle, t’en as pour quatre heures et demi d’avion et deux heures de décalage horaire. Une fois, à Dallas avant de jouer Toronto, on est restés toute une journée à l’aéroport à cause des intempéries. Et le décalage horaire, ça change tout dans la préparation du match.

Changement de formule pour la Ligue

C’était un seul championnat cette année, ça va désormais être deux conférences de six avec match aller-retour contre ta poule et un ‘’match sec’’ face à l’autre conférence, soit là-bas, soit chez toi, en fonction du tirage au sort. Trois à domicile, deux à l’extérieur ou l’inverse. Ensuite, le premier de chaque ligue est automatiquement en finale de sa conférence et affronte le vainqueur du match entre le deuxième et le troisième. Puis les vainqueurs, de l’Ouest et de l’Est, s’affrontent pour une grande finale, laquelle déterminera le champion de la MLR.

Crédit photo : Norma Salina.
Jaoudat a marqué quatre essais avec Austin. Crédit photo : Norma Salina.

La suite à Austin

Le club n’a pas conservé Alain Hyardet et son staff. Ils veulent tout refaire, restructurer le club, faire à leur sauce, à l’américaine. Chaque joueur a eu son entretien mais on ne sait pas du tout si on reste. En fait, comme en NBA, il va y avoir la draft. Chaque club transmet à la Fédération une liste de dix joueurs qu’il va conserver et tous les autres sont mis à la draft. Donc tu peux être recruté comme ça et aussi discuté avec les clubs de la Ligue. À Austin, c’est un vrai chamboulement. David Mêlé ne vient pas finalement, et c’est notamment lié au départ d’Alain Hyardet. Pour ma part je ne sais pas où je vais et plusieurs Français vont partir. Seul Simon Bienvenu (ancien Espoir du Racing 92, lequel est arrivé en cours de saison) est à peu près sûr de rester. Je ne pense pas que le départ d’Alain soit une très bonne chose. Il aurait pu être moins axé sur le terrain mais tout en gardant des responsabilités, son impact sur la franchise aura été énorme, il avait notamment recruté plusieurs joueurs, amené les neuro-trackers (NDLR : système d’entraînement en 3D notamment utilisé par les joueurs de base-ball), les GPS…

Futur

Je suis dans l’optique de rester aux États-Unis encore un an pour ensuite revenir en France. Je me verrais bien ailleurs qu’à Austin, j’ai envie de voir autre chose, de progresser encore plus. Cela devrait se décanter avec la fin du championnat et la draft qui arrive.

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  • AKA
    75025 points
  • il y a 5 ans

J' ai visionné quelques matches et je suis d' accord avec lui, c' est niveau Fédérale 1!

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