Au milieu de cette équipe avec un forte ossature professionnelle, certains jeunes amateurs tirent leur épingle du jeu. Particulièrement le jeune ailier Gabin Villière auteur d'un doublé lors de la victoire des siens face à Nantes (36-15, 5e journée) et un triplé lors de la réception de Bagnères-de-Bigorre (46-27, 8e journée). Pour l'occasion, il a accepté de répondre à nos question en préparant son déplacement à Saint-Médard-en-Jalles ce dimanche (victoire de Rouen 34-8, 9e journée).
Bonjour Gabin ! On a entendu parler de tes jolies réalisations dans certains journaux locaux et on aimerait bien te connaître un peu mieux !
Bonjour, je m’appelle Gabin Villiere, j’ai 20 ans, je suis originaire de Vire (Normandie). Dans la vie, je suis étudiant en Staps et rugbyman au Stade Rouennais. J’ai eu ma licence Management du Sport l’année dernière. Et pour me consacrer pleinement au rugby, je me suis lancé dans une autre licence Entraînement cette année pour pouvoir être à la fois à 100 % dans le rugby et en même temps ne pas perdre de vue l’aspect scolaire. Car le monde du rugby est dur et il y a très peu de place.
Tu viens de Vire ? Mais comment en es-tu venu au rugby et surtout comment es-tu arrivé à ce niveau-là ?
J’ai commencé le rugby à 6 ans au RC Bocage Virois, j’y ai fait toute mon école de rugby jusqu’à ma première année Juniors où je jouais demi de mêlée. Ensuite, j’ai eu envie de tenter ma chance dans le rugby, j’ai donc commencé à faire des détections un peu dans toute la France (Toulon, Stade Français, Massy, Racing Métro et Lyon). Ces tests m’ont apporté une expérience nouvelle, une ouverture sur un monde que je ne connaissais pas vraiment. C’est alors que le Stade Rouennais m’a contacté par le biais de Jérôme Dunay qui était mon entraîneur en sélection pour faire partie du nouveau projet du club avec l’arrivée de Richard Hill. C’est donc sans hésiter que je me suis lancé et que j’ai rejoint le Stade Rouennais en Juniors 2e année en 2013.
Tu es donc un pur produit du Rugby Normand ! Penses-tu que le rugby normand manque vraiment d'ambition comme le disait Silvère Tian, qui a débuté à Flers, dans une interview récente ?
Ce dont je suis sûr c’est que le rugby normand ne manque pas d’ambition, tout est en cours de structuration en Normandie et je suis très heureux que cela avance. De plus en plus d’intervenants fédèrent autour de ces ambitions qui sont celles d’un club mais aussi de toute une région. La seule chose que je peux lui dire est qu’il est invité et le bienvenu pour passer une journée en Normandie pour venir voir concrètement comment les choses avancent, ce sera avec plaisir.
Et toi, que penses-tu du rugby normand ? Par quoi passe son développement ?
Le rugby normand avance et se structure progressivement. Ce n’est pas un projet à court terme, mais un travail à long terme, qui se fait étape par étape. Aujourd’hui en Normandie, on parle de plus en plus rugby, les gens veulent s’identifier et s’associer à l’image renvoyée par le rugby. On observe une certaine cohésion entre les clubs qui entretiennent de bons rapports et sont enthousiastes, tout le monde va dans le même sens et y trouve son intérêt. Et je sais que Rouen est très impliqué dans ce projet commun. L’apparition d’une équipe Belascain cette année à Rouen a ravi la région et les clubs, les jeunes Normands ont du potentiel (2e derrière Massy). Les joueurs et entraîneurs de l’équipe première interviennent dans les clubs en Normandie pour apporter leurs connaissances et leurs expériences. Interventions dans les écoles primaires de la métropole de Rouen qui ont abouti à un tournoi de rugby avec plus de 500 jeunes et de nouveaux licenciés dans les clubs.
Ce sont même les villes qui donnent de l’élan au projet avec par exemple au Havre le HAC (1er club de rugby en France) qui se voit attribuer le Stade Jules Deschaseaux (plus de 16 000 places). Ce qui manque aujourd’hui pour franchir un cap ce sont des formations pour les éducateurs dans toute la Normandie. Il faut prendre les choses en main pour former les personnes qui vont faire grandir nos apprentis rugbymen. Et même les entités de la fédération doivent croire à ce projet du rugby en Normandie qui sera, j’en suis convaincu, réalisé sur le long terme. Une dernière chose qui manque au rugby ici, c’est de la visibilité au niveau national, car même si les choses avancent à grands pas, il faut que le nombre d’intervenants ne cesse de croître.
Peux-tu nous parler de la saison en cours et de la vie de l'équipe Fanion du Stade Rouennais ?
Le Stade Rouennais évolue en Fédérale 1 pour sa deuxième saison. L’effectif de l’équipe première compte une trentaine de joueurs dont la plupart sont professionnels. Il y a quelques exceptions comme moi, qui suis encore étudiant et qui bénéficie d’une convention avec le club ou d’autres qui sont au club depuis longtemps et qui ont gardé leur travail. C’est un effectif très hétéroclite avec tous les âges et plusieurs nationalités (plus de la moitié du groupe est néanmoins française). Nous avons le fonctionnement d’un club professionnel avec plusieurs entraînements par jour. De plus, malgré ce mode de fonctionnement, la vie du groupe est très saine et l’ambiance entre les différents joueurs est vraiment excellente.Et ça a l'air de fonctionner comme le montrent vos résultats ! Tes réalisations te propulsent également sous les projecteurs ! Peux-tu nous raconter l'une d'entre elles ?
Suite à un coup d’envoi donné par Bagnères-de-Bigorre, je réceptionne le ballon sur le côté dans nos 22 mètres, j’arrive à éviter l’ailier adverse qui était monté en pointe sur moi. Ensuite, j’ai contourné le bloc d’avant qui n’était pas monté en ligne, à partir de là, j’avais le champ libre devant moi. Puis j’ai modifié ma trajectoire de course pour passer le ballon à un soutien au niveau des 22 mètres adverses qui a fixé les deux derniers défenseurs pour me faire une passe après contact et je n’avais plus que quelques mètres à faire pour aplatir en terre promise.
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Maintenant que la phase aller est presque terminée, quel bilan en dresses-tu et comment envisages-tu la suite de la saison ?
Après un début de saison compliqué avec deux défaites sur les deux premiers matchs, nous sommes actuellement sur une bonne dynamique avec 6 victoires d’affilée dont 3 bonifiées. Nous sommes actuellement la meilleure attaque de la Fédérale 1 avec 34 essais marqués. En défense, c'est nettement moins glorieux mais c’est que du plaisir de jouer dans une équipe où le ballon vie et arrive aux ailes. Il n’y a pas de pression, on prend du plaisir et nous sommes motivés. Cette poule où le niveau est élevé est parfaite pour progresser et être prêt pour les play-offs. Les trois années passées nous avons atteint les play-offs et à chaque fois nous avons été liminés en 1/4 de finale contre les futurs champions de France (Soyaux Angoulême, Strasbourg et Chambéry).
Cette année il faut aller plus loin. En ce moment je suis aux anges, mes performances dépassent mes attentes. J’arrive maintenant à évoluer plus sereinement sur les terrains de Fédérale 1. C’est compliqué de se démarquer quand on est jeune en Fédérale 1 mais ça donne de la confiance et de l’expérience, c’est top ! Après je ne sais pas si cette dynamique va continuer mais je reste motivé et concentré pour pourquoi pas par la suite voire un peu plus haut.
Désolé de remuer le couteau dans la plaie, mais comment vis-tu le fait que Rouen n'ait pas eu l'accès à la poule Élite ?
Cette nouvelle a un peu plombé le moral des troupes au début de la saison car le côté sportif était prêt à affronter la poule élite. Maintenant pour cette année c’est peut-être un mal pour un bien car cette saison va réellement permettre de construire une base solide sur laquelle on pourra s’appuyer l’an prochain pour viser plus haut. Notre objectif actuel est donc d’atteindre le carré final du Trophée Jean Prat pour montrer que nous avons le niveau d’aller plus haut. Et plus personnellement, cela va me permettre d’engranger de la confiance et de l’expérience pour la suite.
Quels sont tes objectifs et tes ambitions pour ta carrière à venir ? Tu t'imagines en Pro D2 d'ici 2 ans ? Voire plus haut ?
Honnêtement, jouer un jour en Fédérale 1 était déjà un rêve pour moi quand je suis arrivé. Maintenant que j’ai goûté au rugby de haut niveau que ce soit aux entraînements ou aux matchs, je n’ai plus envie de le quitter et j’imagine autrement la suite. J’ai envie de tout donner, de tenter ma chance et de m’épanouir dans le rugby. Après je sais que cela ne dépend pas que de moi. Mais oui, je m’imagine un jour jouer plus haut. Je vais avoir 21 ans à la fin de l’année, j’ai encore envie d’avancer, d’apprendre et je ne demande que ça.
A ce propos, quand on tape ton nom sur Facebook, on peut trouver une page "Fan Club de Gabin Villière". Qu'est-ce que ça te fait ?
Ah ah, je m’y attendais à celle-là ! Ce sont des amis de mon ancien club qui ont créé ça lorsque j’ai marqué mon premier doublé face à Nantes. Au début, je n’étais pas vraiment serein, je ne savais pas vraiment ce qu’ils allaient faire de cette page et finalement, ils se sont pris sérieusement au jeu et ils publient régulièrement des informations et des nouvelles sur moi et sur le club de Rouen. Ça fait bizarre d’avoir une page sur soi avec près de 350 personnes qui suivent. Je n’aime pas cette sensation d’être mis en avant même si ça peut paraître beau surtout quand on est jeune, mais je sais que si ça se passe mal ça passera du tout au rien.
Du coup, je ne m’en occupe pas trop même si je me fais pas mal chambrer, je reste concentré dans mon rugby. Sinon je trouve le concept vraiment sympa, ça permet déjà à tout le monde de suivre ce qu’il se passe au Stade Rouennais mais ça m’a aussi permis de reprendre contact avec des gens que j’avais perdus de vue. Je remercie malgré tout mes amis du RCBV pour l'avoir créée et pour me soutenir.
Maintenant que tout le monde à envie de venir te voir jouer à Rouen, que nous conseilles-tu pour passer un bon week-end ?
Commencer la journée par une balade sur les quais de Seine, s’arrêter manger des produits du terroir normand dans un des restaurants du quai de Seine rive droite. Dans l’après-midi, faire la rue allant de la cathédrale Notre Dame de Rouen jusqu’à la Place du vieux marché. De nombreuses boutiques et visites sont à faire dans cette grande rue avec par exemple l’Historial Jeanne d’Arc ou le Gros Horloge qui offre une vision à 360° de Rouen. Une fois les visites faites, boire un verre dans un des nombreux bars Place du vieux marché. Puis finir la journée par la Colline Sainte-Catherine pour admirer le coucher de soleil sur les hauteurs de Rouen.
Joli programme ! Et pour le Rugby un peu plus connu que le rugby normand j'ai quelques questions !
Quel joueur admires-tu particulièrement ?
Virimi Vakatawa, performant à VII comme à XV, tenant la balle à une main, il trouve toujours la bonne solution face aux différentes situations de jeu. J’adore !
Un ailier donc ! D'ailleurs, puisque c'est ton poste, décris nous l'ailier idéal !
Rapide et finisseur, capable de créer du danger et de conclure les mouvements collectifs.
Pour finir, tournée d'automne oblige, qu'est ce que tu préfères entre une défaite encourageante et une victoire très moche ?
J’aime bien les défaites encourageantes mais je préfère quand même une victoire très moche !