J'ai été voir pour vous... RC Vincennes vs LORC Marquettois en Fédérale 2 féminine : l'avant-matchDimanche 21 octobre, 14h55 : coup d'envoi du match RC Vincennes - LORC Marquettois. Et ça commence fort, avec la réception du ballon par « Doudou », pilière de son état, qui, ayant vu la feuille avant le match, déclara : « Y a qu'une seule Dounia sur le terrain, c'est moi, l'autre je la sors ! ». C'est donc tout naturellement que le premier ballon consistera en... une grosse charge bien dans la mouille des Lilloises ! Mes yeux de néophyte sont tout surpris : ces jeunes filles que je regardais d'un peu haut, malgré mes moins d'un mètre quatre-vingts, s'envoient comme des mortes de faim ! Et que ça déblaye dans les rucks, et que ça charge dans les défenses, et que ça plaque à tour de bras... A peine cinq minutes de jeu, et déjà l'occasion de constater ce que sera l'après-midi entière : du rugby total. Bon, ça n'empêche pas quelques en-avants bien sûr, et on assiste vite à la première mêlée du match, à l'avantage des Nordiste.
Et la mêlée est gagnée par Vincennes, sur la poussée ! Un contre-ruck plus tard, le ballon est récupéré par les Z'ab, avant qu'un en-avant rende la possession aux locales. Et derrière la mêlée, c'est la numéro 8, Bertille, déjà connue de nos lecteurs assidus, qui mène la charge. Elle finira en touche sur les 22, balancée comme une malpropre par ses adversaires. Touche qui, comme la première mêlée, sera gagnée par les filles du RCV, très en forme en conquête.
Le jeu s'enchaîne jusqu'à la première pénalité du match, consécutive à une plaquage haut des visiteuses. On joue donc logiquement la pénaltou... Ah non on joue à la main, excusez-moi. J'anticipe un peu, au temps pour moi. Dans la foulée, le jeu se poursuit et les Z'ab héritent d'une mêlée quasiment sous les poteaux du RCV. Les pénalités s'enchaînent, on sent que la rupture est proche... Et essai du LORC ! Après plusieurs temps de jeu, au près, le ballon est écarté vers les 3/4 qui terminent le boulot, en coin. La transformation est manquée, mais les visiteuses mènent déjà 5-0 après 20 minutes. Vingt minutes durant lesquelles on n'aura pas quitté le camp du RCV, qui aura eu le ballon pourtant, mais n'aura jamais réussi à percer ou se dégager au pied. D'ailleurs, le pied, on connaît pas : depuis le coup d'envoi, il n'y en a pas eu.
Le renvoi est joué, et une percée des Lilloises ramène le jeu presque immédiatement dans le camp de Vincennes, auquel on sent que personne ne veut faire d'infidélité. Une pénalité jouée vite en passe au pied (même moi ça m'a surpris), un rebond capricieux qui trompe l'ailière, mais pas la talonneuse qui a suivi, et voici déjà le deuxième essai de la rencontre, toujours pour les visiteuses. Toujours en coin, toujours pas transformé, ça fait donc 10-0.
Sur ce deuxième renvoi, on prend les mêmes et on recommence : cavalcade nordiste dans la défense locale, enchaînement de passes et de temps de jeu, et nous voici de retour dans les 22 mètres de Vincennes, que décidément on ne veut plus quitter. Mais à le demi-heure de jeu, surprise : carton blanc pour les Z'ab, pour accumulation de faute. Elles joueront donc à une de moins pour les 10 prochaines minutes. Les filles du RCV peuvent gérer la fin de la mi-temps, jusqu'à même, miracle, avoir une possession de balle dans le camp adverse ! Mais les en-avants annihilent tout espoir d'un meilleur sort, et les deux équipes se quittent pour les 10 minutes règlementaires de la mi-temps. Confidence de l'arbitre : « Le match est cool, je m'amuse bien. » Le fait que le terrain soit en plein soleil doit aider (nous en tout cas on commence à se sentir frisquette sous l'ombre de la tribune).
Le match reprend, et c'est au tour du RCV de se retrouver en infériorité numérique suite à un carton jaune : une joueuse a fait plaquer son adversaire alors que celle-ci avait tapé à suivre. Pas juste un plaquage à retardement hein : un vrai plaquage, comme si elle avait encore le ballon. Le carton change de couleur, il devient jaune pour cette faute d'anti-jeu. Dans la foulée, les Z'ab en profitent pour planter une troisième branderille et porter la marque à 15-0 (toujours pas de transformation, donc).
Sur une action anodine vers la ligne médiane, alors que Vincennes a la balle, un tampon terrible se fait sur la première centre, qui vient percuter frontalement la défenseuse qui l'attendait de pied ferme. Un plaquage bien dans la règle, qui la laisse à terre, le souffle coupé. Didier s'élance, trousse en main, pour contrôler que sa joueuse va bien. Pas de problème pour elle, qui, telle une Floriane Fritzette grognonne, demande à rester sur le terrain.
On ne bougera plus de la moitié de terrain des locales. Elles s'arc-boutent en défense, qui, selon l'aveu de Lovely, est le chantier de travail le plus gratifiant, car étant celui dont les résultats sont le plus immédiats. Pas bête, pensais-je. L'attaque viendra donc plus tard, tout comme le jeu au pied. Lovely toujours : « On est la seule équipe à attaquer depuis nos 5 mètres ! ».
Cette stratégie, pleine de bonnes intentions, s'avère toutefois hasardeuse : la porteuse du ballon se fait coffrer par des Z'ab qui sont passées en mode irlandaises, et qui récupèrent donc la possession sur mêlée. Derrière, c'est un magnifique essai en première main, en coin. Le lecteur l'aura deviné, la transformation est manquée, nous en sommes donc à 20-0.
Le public, qui sent qu'il serait temps de se réchauffer un peu, commence à donner de la voix. Ou à chambrer, c'est selon. « La 14, t'es bonne ! » Les supporters locaux sont toutefois bien aidés par l'extinction de voix collective des Ultras Z'ab, très actifs en première période mais qui n'auront malheureusement pas tenu sur la longueur. Contrairement à leurs joueuses, donc. Sachant que le public des Z'ab était constitué en partie des mecs des joueuses, vous en concluez ce que vous voulez.
Sur le terrain, nous en sommes à l'heure de jeu quand l'impensable se produit. Une fulgurance. L'ouvreuse des Z'ab... tape une chandelle ! C'est le premier coup de pied du jeu, hors renvois et pénalités ! En deuxième rideau, Crevette, la demie de mêlée de Vincennes a suivi. Elle court vers son en-but, les mains levées vers le ballon et... se le prend en pleine mouille. J'ai eu mal pour elle. L'arbitre laisse jouer, puisqu'il ne s'agit pas d'un en-avant. Il me confiera d'ailleurs après le match avoir déjà arbitré une équipe qui s'était servie de la règle pour planter un essai parfaitement dégueulasse mais tout à fait valide. Un peu comme le coup de boule de Tonita pour l'USAP à Brive, qui a fini en essai pour Farid Sid (mais les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître, moi-même je n'en ai trouvé aucune trace sur internet et ai dû faire appel à mon infaillible mémoire).
Une dernière mêlée à 5 pour les visiteuses, un dernier essai en première main et on peut siffler la fin de match sur ce score de 30-0. Ah, non, la transformation passe ! 32-0 pour les Nordistes, qui laissent éclater leur joie et commence une petite sauterie sur le terrain avec leur adversaire du jour. On s'applaudit mutuellement, on se fait des haies d'honneur, on chante : c'est beau le rugby quand ça se termine comme ça !Crédit photo : Romain Cordier pour le LORC, Pauline Couturon pour Vincennes
À suivre : l'après-match !
Camadul
J ai deja lu les articles sur le RCV . J'adore !!!!! Bravo et continue , Benjamin , encore Merci et vivement l'après match !
Loyam
J'ai apprécié cette lecture. Comme quoi, le rugby peut être aussi un match féminin, qui se joue dans les règles de l'art, avec respect, sportivité, qualités et défauts.
🙂
Amis à Laporte
Serge Simon rappelle qu'il est médecin et qu'il peut entrer dans les vestiaires après le match.
lelinzhou
Il le sait Bernie Krapul que c'est aussi ça le rugby français ?
Yann Béli
Et pour ceux qui vous disent que c'est pas du vrai rugby : y a une putain de CHISTERA dans les photos ! Oh ! ça joue ou ça joue pas ??
Team Viscères
Pour jouer le relou, d'après la photo ça ne ressemble pas à une chistera mais une passe sous le bras.
Sinon super article qui rappelle qu'il existe un rugby en dehors de celui qu'on voit à la télé, et qui n'en est pas moins plaisant (voir bien plus plaisant, déjà parce qu'en tribunes on n'entend pas Guillemin).
dusqual
ah beh je dois dire que dans l'ensemble de mes pérégrinations depuis l'an dernier, c'est à chaque fois les matches des filles les plus plaisant et pas uniquement pour la plastique des joueuses...