On vit la mondialisation du rugby avec les moyens qu’on a. Ici, à Issoire, on a bien voulu se mettre au goût du jour et acheter quelques joueurs exotiques pour faire comme tout le monde, mais on l’a fait avec nos petits moyens et en gardant la tête froide. Ainsi, depuis quelques saisons, une communauté tend à se développer au sein du club. Une communauté différente de nous autres. Avec sa propre culture, sa propre langue, ses propres traditions et surtout sa propre nourriture. Ils sont désormais une dizaine à jouer en équipe une ou en réserve, et même si leur intégration n’est pas toujours simple, ils font malgré tout parti du paysage rugbystique issoirien.
Eux, ce sont les Cantaliens, que l’on peut aussi appeler les Cantalous sans leur manquer de respect. Et dans cette communauté, un petit dernier est arrivé juste avant le début du championnat, sans faire de bruit, en provenance d’un des clubs cantaliens reconnus : Arpajon. Quentin Claveyrolles joue centre en réserve et nous sommes allés à sa rencontre pour le connaitre un peu mieux et savoir s’il s’acclimate bien dans son nouveau club et sa nouvelle vie. Il nous a reçu chez lui, dans son appartement décoré aux couleurs de son pays, avec des belles photos, du Plomb et du Jean Alric plein comme un œuf. Au-dessus de la cheminée, un trophée de Mouflon empaillé. Et, pour nous mettre très à l’aise, Quentin n’a pas hésité à mettre le dernier album de Traucaterme en fond sonore. On a tout de suite senti qu’il était fier de nous faire découvrir sa culture et ses traditions.
Après nous avoir offert une gentiane accompagnée de Pounti, il nous a expliqué dans un français quasi parfait qu’il avait connu Issoire grâce aux autres Cantaliens qui, quand ils revenaient au pays, n’en disaient que du bien. D’ailleurs, a-t-il rajouté, avec les arrivées de Benoit Tiravy et de Matthieu Chabaud cette saison, les anciens du club originaires du Cantal ont remis en place, une soirée par mois chez l’un ou chez l’autre, ou l’on parle des mauvais noirs, mais aussi du pays en mangeant une truffade préparée par l’une des femmes de la communauté.
Cette tradition jusqu’alors un peu laissée en sommeil a permis aux nouveaux de mieux comprendre le fonctionnement du club et de la ville en général. Machinalement, quand Quentin nous expliquait cela, il s’amusait à remuer une de ces boules en cristal qui se recouvre de neige quand on la retourne. A l’intérieur de cette boule, le viaduc de Garabit, ouvrage ferroviaire majeur du paysage cantalien. Comme nous avons pu nous en rendre compte par nous-même, le Cantalien n’est pas difficile à vivre et s’acclimate plutôt bien à la vie Issoirienne. Et comme le dit Quentin Claveyrolles : « en cas de blues, je sais qu’il existe à Issoire, une brasserie tenue par l’un des nôtres, ou je peux me rendre quand je veux ».
Malheureusement et même si tout parait parfait, une ombre vient quelques fois noircir le tableau. Les entraineurs issoiriens redoutent à chaque fois les périodes de trêves ou les intersaisons. Ces périodes sans rugby sont généralement l’occasion aux Cantaliens de retourner au pays, de retrouver la famille, les amis, mais aussi la bonne gastronomie locale. Nos coachs ne savent alors jamais dans quel état ils vont retrouver leurs joueurs qui se seront gavés de fourme, de Cantal doux, d’entre deux, ou de Cantal vieux, de tripoux, ou de viande Salers dont le Cantalou est friand.