Ah l’ambiance des phases finales. L’odeur du barbecue à quelques encablures de la main courante, des fumigènes en tribunes ; le parfum des matchs couperets, tout simplement. Pour faire vivre ces moments sacralisés à tous ceux qui n’en auraient pas l’occasion (on pense à ceux qui étaient cloîtrés chez la belle-famille ce week-end) ou tout simplement pas l’idée, on a décidé de se rendre à Aubagne (13), dimanche dernier. En bordure de la banlieue marseillaise, se trouve en effet le RC Aubagnais, cador de sa poule chaque saison mais qui végète en Fédérale 3 depuis 2015 maintenant. La faute au mercenariat pour certains, à la malédiction d’un club pour d’autres, depuis son titre de champion de France de la division en 2014. Favori chaque saison ou presque à la montée, c’est pourtant un scénario plus fou que celui de l’année d’avant qui empêche les Rouges et Noirs d’accéder à l’échelon supérieur d’une saison à l’autre. L’an dernier, pour l’exemple, les Provençaux affrontaient les Aveyronnais de Decazeville en 32ème de finale en aller-retour et s’inclinaient au nombre d’essais marqués malgré un match nul en cumulé sur les 2 matchs (45 à 45). A la surprise générale, puisque tout le monde s’attendait à une prolongation, et ce peu importe son camp. Et sous une pluie battante, bien sûr, ayant largement contrecarré les plans des bolides aubagnais, résolument taillés pour un jeu de mouvement. Un énorme coup dur pour cette équipe qui avait survolé la phase de poules…
Le spectre de Decazeville
Un an plus tard, on prend les mêmes et on recommence. Après un premier tour passé haut la main, les coéquipiers de Gaël Davisseau s’inclinent d’un petit point au match aller à Vergt (20 à 19). Malgré ce tirage compliqué, les Sudistes sentent qu’ils ont les ressources pour faire exploser les Dordognais au stade Martelli. Le hic ? C’est que maudits jusqu’au bout, les locaux voient la météo être exécrable tout au long de la semaine dans la région marseillaise, alors qu’il n’a dû y pleuvoir que 3 ou 4 petits jours depuis le début de l’année… Le terrain est gras, presque détrempé, et face à un adversaire plus que coriace notamment sur la ligne de front, le spectre de Decazeville commence réellement à peser au-dessus des têtes aubagnaises. "Bien sûr qu’on y a pensé toute la semaine, nous explique Dorian Hermet, lui, l’enfant du Tarn. Sérieusement, il ne pleut jamais à Marseille, et quand on a vu la pluie toute la semaine et encore ce matin, on s’est dit qu’on avait vraiment rien pour nous. (rires)"
Petit brin de chance, deux heures avant le coup d’envoi, le crachin s’arrête dans la ville de Marcel Pagnol. De quoi ravir la majorité du millier de personnes venues assister à l’un des gros chocs de ces 16èmes de finale de championnat de France de Fédérale 3. La tribune est pleine à craquer, les deux équipes sont prêtes, le coup d’envoi peut être donné ! On sent très vite que dans ces conditions de jeu moyennes, les envolées se compteront sur les doigts d’une main. Les cartouches en revanche, sont trop nombreuses pour être numérotées. De part et d’autre, ça tape très fort et le manque d'occasions franches laisse à penser que la moindre erreur se paiera cash dans ce match. A la pause, rien à signaler, si ce n’est que cette rencontre est pour l'heure un duel de buteurs, même si la percée plein champ de Martin Egiziano (le frère de Clément, oui, oui) après touche (35ème) aurait mérité meilleur sort.
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Et puis, alors qu’Aubagne se faisait de plus en plus insistant grâce à sa puissance physique, vint ce qui ressemble fort au tournant du match. A la retombée d’une touche dans les 5 mètres de Vergt, le talonneur provençal Hervouet fauche en l’air - bien malgré lui - un adversaire, qui retombe sur la tête. Carton rouge inévitable pour l’un des indéboulonnables de cette équipe, et un sacré frisson dans le stade, qui revoit défiler les innombrables échecs et coups du sort des années précédentes. "On a repensé fort à Decazeville, encore une fois, à ce moment-là. Mais paradoxalement, je pense que cela nous a resserrés et obligés à nous démener encore plus. On n'a jamais tremblé." En effet, jamais les Vernois n’iront plus dans les 22 mètres de l’ancien albigeois et de ses coéquipiers. A l’inverse des Aubagnais qui passaient devant grâce à la botte de Combes, avant que la pièce ne retombe (enfin) de leur côté, alors que la partie se jouait essentiellement dans la fameuse zone 40/40 depuis un moment. Sur un petit jeu au pied par-dessus de leur ouvreur, tout le monde se regarde et parmi les 1000 rebonds capricieux que peut avoir cette balle ovale, le dernier choisit comme souvent les bras du plus opportun, à savoir Egiziano, ici.
RUGBY AMATEUR - TRÉLISSAC, L'ASCENSION DE MAXENCE DESSOUDEIX ET D'ENZO KRALFA
Lancé comme une balle dans l’intervalle, l’ancien arrière de La Seyne tirait sur les cannes sur 40 mètres pour résister au retour du remuant ailier droit de Vergt, Dessoudeix. Et libérait Aubagne à 8 minutes de la fin, qui voyait sa tribune s’embraser. Le coup gagnant pour le RCA ? A première vue, oui. Mais puisque les leaders de la poule 7 aiment trembler jusqu’au bout, ils ne pourront s’empêcher de concéder un essai de pénalité (certes sévère) à la 79ème à la suite d’un nouveau rush de Dessoudeix, intenable ce dimanche après-midi. Plus que 3 points d’avance et un renvoi à jouer… qui sera intelligemment distillé en bord de touche, pour pousser plus facilement l'adversaire hors des limites du terrain. C’est fini ! Aubagne remporte sa double-confrontation et jouera en Fédérale 2 l’an prochain, au bout du suspens ! D’ailleurs, quand on demanda à l’ailier Pierre Canourgues son premier ressenti, celui-ci fut on ne peut plus parlant de la pression qui pesait sur les épaules des locaux avant ce match : "Enfin ! Je n’ai que ça à dire, enfin. Si tu en veux un peu plus, repasse dans 5 minutes, je n’arrive pas à parler pour l’instant." Pourtant, on peut vous l’assurer, l'ancien espoir du RCT est habituellement bien plus bavard et relâché, lorsque vous l'abordez...
duodumat
Excellente initiative ce reportage sur un match amateur.
Bravo à Aubagne !
Jièl
Merci pour ce chouette papier - fort bien écrit d'ailleurs !
AKA
Ce serai bien avec les Régionales, il me semble que dans le temps il y avait des reportages sur des rencontres entre clubs de séries ( c’ était le temps des comités)