Le derby basque enflamme plus que jamais le microcosme du rugby français. Ce samedi, Biarrots et Bayonnais s'affronteront à l'issue d'un barrage qui déterminera laquelle des deux formations évoluera l'an prochain en Top 14. Et qui de mieux qu'Arnaud Héguy pour nous parler de ce véritable évènement au Pays basque. Enfant d'Euskal Herria, le talonneur formé à l'Aviron Bayonnais a disputé six saisons en professionnel sous le maillot Bleu et Blanc (2005-2011), avant d'effectuer le court trajet en ralliant Biarritz. Dans les travées d'Aguiléra il y passera trois saisons. Le natif de Bayonne raccroche les crampons en 2019, puis se reconvertit en tant qu'entraîneur. Après avoir pris en charge le club souletin de Mauléon (Fédérale 1), il se lancera dans un nouveau projet à partir de la saison prochaine, en rejoignant Grenoble, formation qu'il a également connu en tant que joueur. Pour nous, il revient sur ses souvenirs de Biarritz-Bayonne et nous donne son avis pour la rencontre de samedi.
Vous avez joué pour les deux clubs. Y a-t-il un des deux pour qui cette notion de derby est plus importante ou est-ce comparable ?
C'est quasi similaire. Il y a la ferveur, surtout la ferveur des supporters, l'ambiance, etc. Je vais dire que cela dépend notamment de l'endroit où les joueurs habitent (rires). C'est surtout dans la ville, au café, au bar, au restaurant où on nous parle uniquement de ça. Au fur et à mesure que le match approche, on sent bien la pression qui monte en interne dans l'équipe et pour les nouveaux, c'est quelque chose de très agréable à vivre et tous en retiennent de très bons souvenirs.
Justement, avez-vous senti un peu de rancoeur chez les supporters bayonnais au moment de votre départ pour Biarritz ?
C'est comme tout. Ceux qui n'ont pas compris ou du moins qui n'était pas au courant du pourquoi du comment j'ai quitté Bayonne ne l'ont forcément pas vu d'un très bon oeil. Mais la plupart savaient, étaient au courant et ont compris les raisons de mon départ. De manière générale, je n'ai pas été trop impacté. Je n'étais pas le premier et je n'étais et ne serai pas le dernier non plus. De mon côté ça a été bien assimilé et surtout bien digéré par le public bayonnais.
Si vous deviez sortir du lot un derby que vous avez disputé, ce serait lequel ?
C'est très compliqué d'en sortir un. Après il est vrai qu'à chaque derby il y a ce truc. Le premier que j'ai joué j'étais à Bayonne, c'était quasiment les premiers matchs de ma carrière, je me souviens qu'on en avait pris 40. Même si sur le terrain on était pas invité, c'est vrai que ça marque. Et ensuite quand j'ai été du côté de Biarritz, cela a toujours été des rencontres très serrées, notamment celui où l'on gagne sur la fin avec une pénalité de Julien Peyrelongue (lors du 100e derby basque). C'est difficile d'en sortir un. C'est plus la préparation de la semaine qui est le plus marquant pour moi sachant que je suis d'ici et que je connais l'enjeu depuis tout petit. Donc comme je l'ai dit, personnellement, c'était plutôt tout le déroulement de la semaine.
Quelles sont les moments forts que vous retenez de ces derbys que ce soit sur et en dehors du terrain ?
Je me souviens de la pression qui est forte. Ce que je retiens, c'est surtout le côté avec les supporters, les gens autour de toi, les voisins, la famille qui, à l'approche du match, nous envoie des messages, des petits mots qui font que tu sens l'importance de ce match-là. En attendant le match retour ou celui de l'année d'après, tu sais qu'on va te le rappeler. Si je dois citer quelques anecdotes ? J'en ai certainement plusieurs dont une où j'ai subi un ko... Je me souviens que cette rencontre avait été sous haute tension. Je dirai plutôt que les anecdotes ce sont plus avec les supporters, avec la famille ou les dirigeants du club qui nous font monter cette pression durant la semaine.
Selon-vous, est-ce le plus gros derby du sud ouest ? On sait qu'en amateur notamment dans le Pays basque, Landes ou Béarn, il y a des derbys dans chaque division.
Aujourd'hui dans le coin, Biarritz et Bayonne c'est là où il y a le plus grand nombre de supporters, ce qui crée forcément tout cet engouement. Puis nous sommes au plus haut niveau. Après, un derby reste un derby. Pour avoir observé et entraîné à Mauléon, je sais que des Mauléon-Oloron ou par le passé des Mauléon-Garazi (aujourd'hui Nafarroa), cela reste des rivalités qui font parler. C'est la notion de derby. On sait que dans les commerces dès qu'on te voit on t'en parle, il y a aussi une hiérarchie par rapport au territoire. Mais aujourd'hui, Bayonne-Biarritz c'est forcément décuplé. De l'intérieur du Pays basque jusqu'au sud des Landes et la frontière espagnole on est soit Biarrot, soit Bayonnais. Alors on appartient ou on se rattache à des clubs amateurs, mais au-dessus il y a toujours la hiérarchie des deux clubs, qui fait qu'il y a toute cette passion et que cela donne une telle ampleur au niveau du derby. Oui accessoirement Bayonne-Biarritz ça reste le plus gros derby au niveau local.
À l'échelon national et professionnel aussi selon-vous (il y a notamment un derby Racing-Stade Français en barrage) ?
Certes, les deux clubs parisiens sont en haut et ça reste un derby. Mais je reste persuadé qu'un derby c'est aussi une fête, tout ce qu'il y a autour, l'ambiance, l'engouement. C'est tous les à côtés et en annexe du match. Je pense qu'aujourd'hui cette confrontation basque Bayonne-Biarritz ça reste LE derby au niveau national et c'est tout à l'honneur des supporters et des abonnés des deux clubs qui mettent tout en oeuvre pour que la fête soit bien réalisée.
Donc il y a toujours autant d'engouement derrière ce match, malgré la situation des deux clubs qui ne sont plus en haut de l'affiche ?
Je pense qu'il y a toujours cette ferveur. On voit bien actuellement notamment avec l'évolution des réseaux sociaux, l'engouement qu'il y a à l'approche de ce match. Tout le monde le redoutait mais le voulait à la fois. Depuis le début de la saison, on entend certain dire en rigolant ''méfiez-vous de voir un Bayonne-Biarritz en barrage'' et finalement on l'a. Il doit y avoir des supporters frustrés puisque malheureusement il y a un des deux clubs qui sera amené à évoluer en Pro D2, mais ça reste malgré tout une belle fête, surtout en cette période de Covid. Cela va permettre de sortir de nouveau, de profiter de ce match là et faire la fête.
Les deux clubs ne se sont plus affrontés en Top 14 depuis la saison 2013/2014. On imagine que vous auriez préféré une autre affiche lors de ce barrage afin de voir les deux formations basque évoluer au sein de l'élite la saison prochaine ?
Sans faire de langue de bois, bien évidemment. J'aurai préféré que les deux clubs soit au plus haut niveau et que l'on ne soit pas contraint d'en voir un en haut et l'autre en bas. Après c'est le constat, c'est le rugby professionnel et malheureusement aujourd'hui la situation de Bayonne a fait qu'ils se sont retrouvés là. Sportivement ils auraient très bien pu se sauver, ils avaient les cartes en main. Les Biarrots de leur côté, en perdant cette finale se sont quand même donnés les moyens de jouer la montée, avec une emprise éventuelle psychologique du fait qu'ils n'ont rien à perdre. On se retrouve donc avec cette affiche. Il est clair que personnellement j'aurai aimé voir deux autres équipes, c'est-à-dire ne pas forcément retrouver les Bayonnais dans cette situation et éventuellement voir les Biarrots remporter leur finale face à Perpignan et monter directement.
En cas de montée en Top 14, pensez-vous que Biarritz pourrait perdurer à ce niveau ?
On a vu par le passé, depuis 3-4 années et cette mise en place de phase finale avec le match d'accession, que c'est très compliqué pour le club perdant de la finale. Pour avoir fait l'expérience avec Grenoble, on a fait l'ascenseur. On est monté puis en suivant redescendu. Perpignan l'a connu aussi. Cela reste très difficile aujourd'hui. Si Biarritz venait à monter, ce serait compliqué notamment au niveau du recrutement. Nous sommes très tard dans la saison. Maintenant les transferts se font dès le mois de décembre ou janvier, donc pour structurer et organiser une équipe ça n'est pas évident. Alors c'est bien car on voit des ''phases finales'', mais tant que cette formule mise en place fera en sorte que le finaliste saura au dernier moment s'il monte ou non, ça restera difficile de construire un bel effectif pour pouvoir rivaliser avec les clubs de Top 14.
De son côté Bayonne a terminé barragiste à l'issue de la dernière journée...
Les joueurs doivent être très frustrés. Ils ont alterné le bon et le moins bon. On a vu que face à de grosses écuries ils ont su rivaliser et aller chercher quelques points mais après il y a eu des déconvenues. Ils ont été maître de leur destin jusqu'au dernier moment par rapport à ce maintien. Alors voilà maintenant il faudra voir si aujourd'hui, il n'y a pas eu un trop gros impact psychologique sur ce groupe-là. Je ne l'espère pas. Mais on va dire que leur saison est à l'image de ces deux-trois derniers matchs. Il y a du bon mais à la fois pas assez pour pouvoir se maintenir le plus tôt possible.
À l'inverse, Biarritz a réalisé une belle saison...
En effet, à contrario le BO a connu un petit passage à vide dans l'hiver, mais les joueurs ont fait une deuxième partie de saison plus qu'honorable. Ils ont enchaîné plusieurs victoires en sortant de cet hiver avec des conditions difficiles. Ils ont des joueurs d'expérience comme Armitage, Dyer, Saili, qui ont vraiment amené une grosse plus-value à ce groupe, avec notamment des gros contests au niveau des rucks, et ils ont été très efficaces. Après ils sont allés gagner à Vannes, puis il y a cette défaite face à Perpignan. Là aussi la saison est très longue, ça fait un an qu'ils ont repris puisque les premiers entraînements ont eu lieu en juin. Il ne faudrait pas qu'ils soient un tout petit peu essoufflé, avec des conditions samedi difficiles, puisqu'il doit faire très chaud. Pour moi, la saison des Biarrots est plus que positive avec un petit trou d'air mais finalement ils sont au rendez-vous. Je pense qu'en début de saison, si on leur avait dit qu'ils allaient jouer un match d'accession, ils auraient signé de suite.
Bayonne compte un contingent important de joueurs du cru dans ses rangs. Biarritz également mais un peu moins que son voisin. Est-ce un avantage pour l'Aviron ?
Non, je ne pense pas que ce soit un avantage. C'est juste une prise de conscience. Comme je l'ai dit au départ, l'engouement quand on est ici, on sait exactement l'attente des supporters, du public et toute la préparation en amont de ce match-là. Après samedi, ça va être de la stratégie, de la discipline et qu'on soit d'ici ou pas, c'est la qualité intrinsèque du joueur et du groupe qui parle. Mais aussi ce que les deux clubs vont mettre en place sur le terrain en termes de stratégie et de tactique. La maturité de l'équipe est importante également. Après oui forcément pour la préparation mentale, pour motiver les mecs, le fait d'être ici fait que la motivation sera toute trouvée. Mais j'y mets quand même plus d'importance sur la maturité et la statégie qui va être mise en place plutôt que le fait d'être du coin ou d'être natif de la région.
Vous l'avez déjà rapidement évoqué mais quelle sera la clé du match ?
Pour moi, ça va être très tactique et surtout la discipline sera primordiale. On sait que les Biarrots ont une grosse faculté de contester les ballons dans les rucks. Aux Bayonnais de s'adapter et de contourner tout ça. Et puis les Biarrots sont dans la position d'une équipe qui n'a rien à perdre et essayer de déployer le maximum de jeu pour essayer de déstabiliser la défense bayonnaise.
Votre pronostic ?
Je l'attendais celle-là (rires) ! C'est très compliqué. Cela va être un match très serré, notamment avec les conditions, la fatigue. S'il faut je vais me tromper et il va y avoir 40 points d'écart mais j'en doute fortement. Quoiqu'il en soit il y aura malheureusement un déçu. Je préfère m'abstenir et je ne souhaite à aucun des deux d'être dans la position inconfortable samedi soir.
Vous soutiendrez une équipe ?
Pas du tout. Je ne cesse de le dire mais de par ma situation l'an prochain (il dirigera Grenoble) et dans le malheur d'une des deux équipes j'y trouverai mon bonheur puisque j'aurai un voyage au Pays basque avec Grenoble. L'avantage pour moi est de venir jouer ici dans le coin au moins une fois la saison prochaine.
L\\\'ibère
On voit bien qu'il n'a jamais joué un derby Toulon - La Rochelle
Le Haut Landais
"Ceux qui n'ont pas compris ou du moins qui n'était pas au courant du pourquoi du comment j'ai quitté Bayonne ne l'ont forcément pas vu d'un très bon oeil."
je ne sais pas dans quelles conditions no pourquoi il a quitte l'Aviron pour le BO, quelqu'un peut-il m'expliquer?
oc
Il ne supportait plus le climat ,
il a opté pour le sud !