Que vous le vouliez ou non, vous, amouraché du rugby, vous ne pouvez pas passer à côté de son patronyme. Asier Usarraga, pas besoin d’être du cru pour comprendre en un claquement de doigts que le garçon est un Basque, un vrai. Formé au Bera Bera de San Sebastian, le troisième ligne espagnol traverse la frontière pour rejoindre le centre de formation du Biarritz Olympique vers la vingtaine, avant de faire ses débuts en ProD2 fin 2014. Le rêve pour lui d’allier les deux choses qui rythmaient alors sa vie : le Pays Basque et ses envies de rugby professionnel. Bien des années plus tard, à force de travail et d’abnégation, Usarraga vient de débuter en Top 14, sous les couleurs du rival bayonnais, l’autre grand club basque, tiens tiens. Et les supporters dans tout ça ? « Il y en a plein qui sont venus me parler en basque. Je pense qu’ils sont contents de voir un joueur avec qui ils peuvent parler en euskara (la langue basque NDLR) », coupait le principal intéressé pour Rugbyrama.
Après de longs mois à poireauter dans les entrailles de Jean-Dauger, la faute à une vilaine blessure aux adducteurs à son arrivée, l’un des noms les plus évocateurs de ProD2 à enfin eu sa chance à l’échelon supérieur, dans l’élite du rugby français. Et quelle première ! En seulement 56 minutes et malgré la défaite bayonnaise d’un point face à Pau (22 à 23), Asier a détonné au milieu d’une équipe un peu amorphe après presque un mois sans jouer. Auteur d’un gros grattage sur un temps fort palois en première période, d’un relai plein de punch en début de seconde, l’enfant de l’Hegoalde a affiché de belles qualités pour ses débuts, formant une troisième ligne très complémentaire avec Monribot et Taofifenua, l’une des seules satisfactions du soir pour les Bayonnais. Très fort dans le jeu au sol, représentant une belle option en touche, robuste comme il faut (1m88 pour 111kg) pour aller agresser le rideau défensif adverse, nul doute que les pépins mis de côté, Usarraga va s’affirmer comme une solide possibilité dans la rotation de l’Aviron lors de cette deuxième partie de saison.
21’ Réplique immédiate : Gaëtan Germain profite d’un bon grattage d’Usarraga pour inscrire une deuxième pénalité. 6-10#ABSP
— Aviron Bayonnais (@avironrugbypro) January 16, 2021
Parcours semé d’embûches
Lui ? C’est donc ce jeune numéro 7 de 26 ans aujourd’hui, qui a traversé la frontière à une époque où cela n’était pas encore démocratisé. Scruté de près par les yeux basques, ses premières années en deuxième division sont encourageantes… sans être une franche réussite non plus. Enfin si, la saison 2015-2016 est celle de l’avènement pour Usarraga, qui dispute 25 rencontres dont 15 en tant que titulaire, l’exercice le plus prolifique de sa (jeune) carrière en terme de temps de jeu. Pour autant, l’année qui suit, le basque espagnol ne joue presque plus, la faute à plusieurs indisponibilités et le reste, qui l’empêchent de faire pleinement partie des plans des coachs biarrots à l’époque. Alors qu’à l’été 2017 son contrat touche à sa fin, il n’est pas conservé par le BO. Un feu de paille, Usarraga ? Qu’importe, le garçon dispose de cette intangible grinta espagnole et décide d’aller s’aguerrir en Fédérale 1, du côté d’Albi. Au sein d’une équipe qui fonctionne bien, fort de son expérience à l’étage au-dessus, le jeune homme de 23 ans cartonne. Au point d’être rappelé par ses anciens dirigeants basques en suivant, qui rachètent son contrat dans le Tarn même pas un an après avoir quitté le rocher de la Vierge !
S’ensuivra deux nouvelles saisons du côté du BO, donc, où l’international espagnol (6 sélections) jouera des coudes pour se frayer un chemin au milieu des Adam Knight, De Coninck et consorts. Jusqu’à se forger une solide réputation de plaqueur/gratteur poison pour l’adversaire, suffisante pour attirer les convoitises du Top 14 et du voisin bayonnais sans pour autant être un titulaire à part entière dans son antichambre (84 matchs, 37 titularisations). Au-delà d’un l’imbroglio entre les présidents des clubs concernés lors de sa signature à l’Aviron fin 2019, Usarraga se disait « très heureux » de rejoindre l’élite du rugby français à son arrivée à l’été 2020. « Le déplacement entre Biarritz et Bayonne a été très court. Cela me permet de rester chez moi, au Pays Basque, entouré de ma famille et de mes amis, et de ne pas connaître de gros changements dans ma vie. Cela a facilité mon adaptation dans mon nouveau club », avouait-il pour Actu.fr en juillet dernier. « A 25 ans, je veux franchir un cap. Jouer à Bayonne est une belle et grosse opportunité pour moi d’évoluer en Top 14 et de continuer à progresser en me frottant à ce qu’il se fait de mieux dans l’Hexagone. Je vais tout donner pour essayer de m’affirmer à ce niveau. Cela va être un gros test pour moi d’affronter les meilleurs joueurs de France. On va vraiment voir de quoi je suis capable. »
Et puis, comme si son parcours n’avait pas assez dû emprunter de chemins de traverse, il y eût cette blessure aux ischios à la suite d’une grosse préparation estivale, avant une rechute, encore plus grave, sous forme de désinsertion tendineuse. Bilan ? 4 mois d’arrêt et près d’un an sans jouer, la faute aux aléas et à la crise sanitaire. Pas l’idéal pour arriver dans un nouveau club. Fort d’un mental d’acier et de son immense envie de réussir, l’ancien albigeois a donc rongé son frein jusqu’à surgir tel un lion au moment de sa première apparition en championnat le week-end dernier. « Depuis tout petit, expliquait-il pour Rugbyrama, c’était un objectif, pour moi, de jouer en Top 14. C’est un rêve de pouvoir y être d’autant que ça a été compliqué d’y arriver. » Le calice jusqu’à la lie, mais ça valait finalement le coup, non ?
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