Rugby à 7 - Jean-Baptiste Gobelet : « On ne peut pas se permettre d'avoir le plus gros budget mondial et de finir dernier »
Sydney 7s - France 7 n'y arrive plus.
France 7 cherchait des réponses à Wellington et de Sydney. Mais ses performances ont surtout soulevé de nombreuses interrogations à quelques mois des JO.
France 7 était partie en tournée en Océanie pour les étapes de Wellington et de Sydney avec l'espoir d'avoir une réponse à sa principale question : pouvait-elle performer sans ses joueurs cadres ? Mais ses performances ont surtout soulevé de nombreuses interrogations à quelques mois des Jeux olympiques de Rio. L'ancien international à 7, Jean-Baptiste Gobelet est inquiet pour les Bleus.Rugby à 7 - Jean-Baptiste Gobelet : « On ne peut pas se permettre d'avoir le plus gros budget mondial et de finir dernier »VIDEO. Sydney 7s - France 7 très loin du compte malgré les efforts du prometteur Arthur Retière

"Les absences de Terry Bouhraoua et Virimi Vakatawa n'expliquent pas tout"

Les leaders que sont Terry Bouhraoua et Virimi Vakatawa tirent l'équipe vers le haut. En ce qui concerne l'incapacité de performer à Cape Town, une partie de l'explication se trouve dans leurs absences. Mais attention, il ne faut pas se voiler la face. Il y a une différence entre ne pas pouvoir performer comme à Cape Town dans le Top 4 et finir dernier 16e à Sydney. Leurs absences n'expliquent pas du tout la 13e et la dernière place, plus mauvais résultats du Seven en France depuis le début de la création du World Series. On ne peut pas dire qu'il est normal d'être dernier d'un tournoi sans ces deux joueurs. Il faut trouver un juste milieu.

Quand on voit l'équipe type alignée lors du Wellington 7s et du Sydney 7s, c'était tout sauf une équipe inexpérimentée. Il y avait des joueurs figurant potentiellement dans la liste de sélection olympique. Des joueurs en contrats pros auxquels tu avais ajouté 5 joueurs à XV de Top 14 qui débutent le World Series. C'est-à-dire un groupe de joueurs professionnels. Je pense qu'il y avait largement la place pour ce groupe de montrer un autre visage et de figurer autour de la 8e place mondiale plutôt que la dernière. Il faut savoir qu'en dehors du Top 5 mondial, les autres équipes du circuit ne sont pas composées essentiellement de joueurs professionnels. Certaines sont entièrement amateures.

Donc il faut remettre les choses dans son contexte et prendre conscience de ce qui passe. On ne peut pas se permettre d'avoir le plus gros budget mondial du rugby à 7, supérieur à 5 millions d'euros, et finir dernier d'un World Series. Les nombreuses personnes que je côtoie sur le circuit mondial sont interloquées et ne comprennent pas ce gâchis. La France a une image de "French flair" tellement forte dans le monde que les gens sont déçues de la voir à ce niveau-là dans le Sevens, sport dans lequel elle devrait être sur le toit du monde.

Les joueurs du Top 14 ont-ils déçu ?

Les plus déçus, je pense que ce sont tout d'abord eux. J'ai connu cette situation et ce n'est pas agréable de ne pas performer à titre collectif et surtout individuel quand on attend beaucoup de ta personne. De mon côté forcément déçu, car cette tournée devait servir de révélateur pour savoir s'ils avaient la dimension du World Series et donc olympique. On aurait aimé voir ces joueurs apporter un plus quand on a été reversés en Shield.

Mais d'un autre côté, il fallait s'y attendre. La préparation collective est la clef pour performer. Venir quelques jours avant une étape mondiale pour une préparation olympique, en raison des contraintes des clubs de Top 14, ce n'est pas très professionnel. Sonny Bill Williams et Ardie Savea ont effectué un début de World Series mitigé malgré une préparation intensive depuis décembre, et ils ne commencent que maintenant à trouver leurs repères. Mais eux vont travailler avec le squad tous les jours jusqu'à Rio.

Des joueurs fatigués après quatre tournois

On a vu des joueurs assez fatigués. Certains ont enchaîné les matchs depuis décembre jusqu'à la rupture. On peut l'expliquer à travers trois paramètres :

  • La période de préparation :
    On constate que le début d'année est une période délicate depuis déjà 5 ans pour l'ensemble des pros basés à Marcoussis en raison d'une préparation très appuyée dès le mois de juillet. L'équipe de France réalise toujours un très bon début de saison sur ces deux premiers tournois en accédant aux demies et finales de Cup et après elle s'écroule physiquement dès janvier en accumulant de nombreuses blessures en milieu de saison.

    En cette année olympique, nous avons vu plusieurs nations changer de stratégie en terme de préparation en attaquant la préparation le plus proche possible de Rio. Afin de ne pas consommer trop d'énergie comme les Blacks et les Australiens. L'Afrique du Sud connaît également ce genre de problèmes avec un léger passage à vide sur les tournées asiatiques, mais arrivent à rebondir après. Pour l'équipe de France, le passage à vide est un peu plus lourd comme en attestent les performances sur les différentes tournées les années passées.

  • La gestion de l'effectif :
    En réduisant le nombre de contrats pro de 30 % jusqu'au nombre de 13, la France est allée à l'opposé des autres nations qui sont renforcées comme les Blacks (28), les Boks (36), les Fidjiens. Ce qui ne permet presque plus la gestion de l'effectif en terme de préparation olympique à part faire l'impasse sur des tournées.

  • Le coaching :
    Beaucoup trop de joueurs jouent jusqu'à la rupture. Et dans les moments clefs, on ne peut plus jouer des matchs serrés comme celui de l'Angleterre avec quatre remplaçants frais sur le banc à 30 secondes de la victoire. Le staff doit apprendre de ses erreurs passées et être lucide dans ces moments clefs pour faire entrer du sang neuf.

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France 7 doit-elle revoir son fond de jeu avant Las Vegas ?

Ce fut un point de discorde entre les joueurs et le staff les années passées au vu de notre régression dans l'animation offensive et défensive depuis 2013. Les tensions se sont apaisées pendant les Championnats d'Europe face à des adversaires plus faibles où les qualités individuelles de chacun prenaient le pas sur le collectif. Le fonds de jeu n'est pas quelque chose qui se travaille en quatre semaines, on l'a ou on ne l'a pas. Surtout sur cette période qui s'annonce délicate avec des blessés et des conditions d'entraînements hivernales qui usent les joueurs.

Le retour de quelques cadres comme Manoël Dall'igna peuvent donner plus de liant à une équipe en manque de repères. Mais il faudra prendre aussi en compte que l'on a tiré physiquement et mentalement sur de nombreux joueurs sur les quatre tournois. C'est aussi pour moi une des explications des contres-performances depuis quelques années compte tenu de la dimension physique de ce sport.

Il va surtout falloir vite se régénérer mentalement et physiquement pour être à 100 % disponible. Se dire qu'on va se remettre au travail et travailler plus dur d'ici à Las Vegas, c'est un discours récurrent, mais qui ne veut strictement rien dire, surtout à 7. On ne peut régler que des détails et peaufiner, surtout sur le nouveau format de saison du World Series.

Il y a des détails à régler d'ici à Las Vegas.

  • L'indiscipline :
  • Les Bleus ont été trop indiscipliné,plusieurs cartons jaunes ont été distribués sur des fautes basiques à 7. On remarque certains joueurs contestent quasi systématiquement les décisions arbitrales en levant les bras. Ce qui pénalise et va pénaliser l'équipe à terme sur les débriefing arbitrales et aussi joue sur la performance du joueur.
  • Justesse technique :
  • On sent l'équipe de France toujours dans le coup jusqu'à quelques minutes de la fin où elle accumule les erreurs techniques, faute de mains, mauvais choix, manque de lucidité. Le match de l'Argentine est flagrant car on perds 2 touches dans les dernières minutes pour mauvais lancer. On sort du match tout seul alors qu'on aurait pu avoir 2 possessions dans leurs 30m.
  • Zone de Ruck :
  • On subit trop dans ces zones de contact où les soutiens sont trop passifs. Le fait de s'isoler de ses soutiens et d'aller trop loin dans l'avancée explique les pertes de ballon et l'inefficacité sur les Rucks. Le fonds de jeu devrait permettre de ne pas se retrouver trop souvent sur ce type de situation.
  • Zone aérienne :
  • 70% des ballons disputés se récupèrent après un rebond. Il faut une plus grande réactivité et organisation à la tombé du ballon.

Faut-il faire appel à de l'aide extérieure ?

Pas à cinq mois des JO. C'est déjà trop tard car tout le monde est déjà dans les starting-blocks. C'est même impossible au vu de la politique de garder coûte que coûte des staffs jusqu'à échéance (cf PSA). Plusieurs joueurs avaient tiré la sonnette d'alarme il y a plus d'un an sur les mêmes problématique en terme de fonds de jeu avec une demande de compétences extérieures pour construire un projet jusqu'au JO. Cela s'est révélé préjudiciable pour une grande partie du groupe.

Le Seven français est une nation mineure avec le plus gros budget mondial, c'est une forme de gâchis pour tous et surtout des joueurs de classe mondiale comme Terry et Virimi qui devraient collectionner les titres de Cup plutôt que ceux de la Shield.

Je pense que le rugby français aura besoin de compétences extérieures en termes de coaching, vraiment extérieures tournées vers l'étranger après les JO pour construire des bases solides. Il y a beaucoup de jeunes coachs motivés en France qui sont prêts à être formés par les meilleurs, il faut juste se tourner où se trouve l'excellence. Des entraîneurs d'envergure internationale comme Mike Friday ou Benjamin Ryan pourrait les encadrer.

Tout n'est pas non plus à jeter

Il y a bien sûr du positif. On aurait aimé voir les cadres de l'équipe prendre le leadership dans le jeu ou voir les joueurs du Top 14 performer sur la scène mondiale. Mais on a surtout vu le plus jeune joueur du groupe, Arthur Retière, qui du haut de ses 18 ans a pris ses responsabilités et réalisé un début de World Series fracassant. C'est le grand gagnant de cette tournée qui peut prétendre aisément à une place dans la sélection olympique cet été au côté de Terry. Steve Barry a été propre défensivement et offensivement. Un des rares joueurs à être actif dans le contre ruck mais émoussé physiquement sur les fins de matchs comme l'ensemble des joueurs.

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Qu'on m'explique, comment peut-on avoir le plus gros budget avec 5 millions d'euros et l'un des réservoirs de joueurs le plus petit ???
C'est qu'ils sont forts à la fédération...

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