Rugby amateur - À 16 ans, ils récoltent de l'argent pour que leur camarade puisse jouer la finale
Les jeunes Yvetotois ont récolté de quoi payer le billet d'avion à leur camarade.
À 16 ans, le rugby est important. Mais les amis encore plus et ces jeunes du Rugby Club Yvetotais en Seine-Maritime l'ont bien prouvé.

Mikael Dumesnil est le co-président, avec Christophe Baudin, depuis 3 ans du Rugby Club Yvetotais qui évolue dans le championnat promotion honneur normand. Cette année, après avoir été sauvé plusieurs fois par des refus de montées de clubs de séries, l’équipe senior s’est maintenue pour la première fois sportivement en terminant 6e de leur poule. Mais ce n’est pas le groupe senior qui cette année brille dans le petit village de Seine-Maritime, mais les U16, garant du futur du club et des valeurs si chères aux présidents. 

Le groupe U16 yvetotois a l’air de bien fonctionner ?

En effet, on a un groupe qui vit extrêmement bien. On avait discuté éventuellement d’un rassemblement avec d’autres clubs pour jouer à 15, mais pour diverses raisons ça ne s’est pas fait. On s’est donc retrouvé avec un groupe assez serré qui joue à 10 et qui fait une très belle saison puisqu’ils étaient invaincus jusqu’au week-end dernier en perdant leur premier match de la saison. Ils s’entendent bien et le sérieux aux entraînements est la clé du groupe. Un bon groupe de rugby comme on aime le voir chez les jeunes. 

Mais il y a un jeune du groupe qui nous annonce qu’il déménage pour aller à Chypre avec ses parents. Lors de son dernier match, il y a eu beaucoup d’émotions entre eux et ce joueur. Ce jeune raterait la finale le 19 mai avec ses camarades, car ils se sont qualifiés directement.

Comment ont réagi ses camarades ?

Ils sont venus nous voir en nous demandant si le club était prêt à mettre la main à la poche pour lui financer le billet aller-retour pour qu’il revienne ici jouer la finale. Je leur ai dit que le club voulait bien filer la main à la poche, mais que ce serait bien qu’ils fassent quelque chose pour leur copain. On était ouvert à tout ce qu’ils proposaient, mais sans forcement demander aux parents. 

Qu’ont-ils mis en œuvre ?

On s’est demandé ce qu’on pouvait faire et puis on a pensé à la "foire à tout". On en organise deux par an (la prochaine aura lieu le 23 juin), et l’idée d’avoir un stand pour l’évènement est née comme ça. Derrière, ils ont récupéré des lots à droite à gauche, ils ont récupéré des reliques du club et ils ont organisé une tombola avec un partenaire. Du coup, toute la journée de 5h du matin à 18h, ils ont tenu le stand en l’animant. Ils se sont relayés.

Ils ont récupéré une fois et demi la somme nécessaire pour payer le billet de leur camarade, et qu’il puisse venir jouer la finale avec eux.

Le joueur en question était au courant ?

Le club a fait un virement aux parents en expliquant bien que c’était ses copains qui avaient payé le billet aller-retour et que leur fils sera présent pour jouer la finale avec eux. Mais lui n’était pas vraiment au courant de ce qui se tramait. Ils en avaient un peu parlé entre eux, mais pas plus que ça. Les autres attendaient d’être sûr, il a été mis au courant le jour où ils avaient récupéré la somme. Vu qu’ils ont récupéré un petit peu plus, avec l’argent qu’il reste, ils feront un t-shirt pour le jour de la finale en souvenir de ce jour. 

C’est un bel exemple du monde associatif, surtout à cet âge-là. Peut-être que ça arrive après, mais à 16 ans, les copains comptent beaucoup et ils l’ont prouvé.

Comment va se passer son retour ?

Il va faire l’aller-retour sur les jours qui précèdent et il repart aussitôt après la finale. Il sera hébergé par des copains de l’équipe. Il faut savoir que son père travaille dans le tourisme en tant que responsable d’hôtel, donc il est soumis au déplacement de ses parents. À priori, il a déjà trouvé un club de rugby à Chypre ! 

Ils ont vraiment joué le jeu en étant là de 5h du matin jusqu’à 18h. Certains sont restés toute la journée, d’autres se sont relayés alors qu’on n'avait pas besoin d'autant de monde toute la journée.

C’est étonnant une initiative pareille à leur âge ?

Oui exactement. Ça s’est fait avec beaucoup de maturité puisqu’au début, on leur a dit qu’un aller-retour en avion coûtait cher et on ne savait pas comment l’héberger. Finalement, tout est organisé, ils vont le récupérer et ils le logent avant de repartir. C’est un bel exemple. Cette idée est sortie des vestiaires, ils ont dû en parler sous les douches et l’émulation a fait que.

J’imagine que ce joueur doit être extrêmement apprécié dans le groupe ?

C’est un bon joueur sportivement, mais c’est surtout un bon mec humainement. C’est un bon groupe et les gars s’entendent bien. Je pense aussi que l’émotion a été partagée au dernier match qu’il a joué avec eux et ça réveille un peu l’enjeu que ça représentait pour lui cette finale. En tant que rugbyman, on sait que des finales on en joue pas tous les ans, même si c’est du rugby à 10. 

C’est la première finale pour les jeunes yvetotois ?

C’est la première à 10, mais on a été plusieurs fois sur des finales Normandie, quelques tours en France également. Le championnat à 10 est assez compliqué, on a des clubs qui sont en entente pour survivre, des clubs qui ont de bonnes équipes à 15 et une équipe à 10, etc. Mais on a une formation à Yvetot qui n'est pas trop mal. On a Rémi Leroux qui vient de faire ses premiers pas en Top 14 contre Toulouse et contre Bristol en coupe d’Europe. Il est parti très tôt d’ici, mais ça nous fait plaisir de voir qu’il n’oublie pas le club dans ses interviews. On a également Annaëlle Deshayes qui est pilier de l’équipe de France féminine et qui était la meilleure pilier gauche de la dernière coupe du monde. Là, on a 2 gamins en double licence qui évoluent à Rouen au plus haut niveau national et un arbitre, Sébastien Wattiez, qui a été champion de France des jeunes arbitres il y a 4 ans. 

On essaie d’inculquer ces valeurs aux jeunes, même si on n'a pas une culture de la gagne assez forte. Mais on est pas tous des champions du monde, et dans des clubs de campagne comme le nôtre, l’aspect humain est presque plus important que l’aspect sportif.

Comment un petit village peut-il sortir ces joueurs ?

On a un bassin scolaire et d’emploi qui ne nous permet pas d’évoluer à un niveau très haut, mais par contre on a un bon niveau de formation. Les formateurs sont tous du coin. Certains ne sont même pas d’anciens rugbymen pourtant. Suite à cet évènement, j’ai eu beaucoup de retours de parents dont les enfants ne sont plus au club, et qui m’ont dit qu’à Yvetot, il y avait beaucoup de valeurs. Et ça depuis toujours. Le club s’implique beaucoup au niveau de la vie communale, socialement. Par exemple, on fait des repas pour les restos du cœur et des collectes de bouchons pour une association qui finance du matériel adapté pour une joueuse de rugby en situation de handicap.

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C'est moi ou on ne sait pas qui répond aux questions ? (à 2h de recherche j'ai enfin trouvé les commentaires au milieu de 2 ou 3 pages de pubs).

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