La Roumanie, 16e au classement World Rugby, avait clairement la pression sur les épaules à l’heure de recevoir l’Espagne (21e). A raison, car c’est une sélection espagnole joueuse qui s’est présentée au Stade Arcul de Triumf de Bucarest pour défier les Chênes. Toutefois, ces belles intentions ont été en partie annihilées dans un match où les défenses ont fini par prendre le pas sur les attaques. Les deux équipes se sont franchement envoyées défensivement, et comme bien souvent dans ce genre de matchs, ce sont les plus pragmatiques qui l’ont emporté. Les visiteurs, en grande souffrance dans le secteur de la mêlée fermée, ont également payé leur indiscipline face au froid réalisme des Roumains. Les locaux n’ont pas été exempts de tout reproche, mais n’ont pas commis trop de fautes dans leur propre camp. Pourtant, les Leones ont résisté et ont joué crânement leur chance.
Résumé
Dès les premières minutes, les hommes du Gallois Lynn Howells ont annoncé la couleur : leur jeu sera rude et efficace. C’est ainsi qu’à 2’, l’ouvreur roumain Samoa prend sa chance à 50m sur la droite. Échec, mais le ton est donné. Au quart d’heure de jeu, suite à une pénaltouche trouvée à 5m de l’en-but espagnol, un ballon porté roumain conquérant concasse le pack adverse. La mode du moment lancée par Huget et Mermoz inspire Florian Vlaicu qui vient se greffer à ses gros, dérobe sournoisement la balle et inscrit l’unique essai de la partie, transformé par ses soins, en s’effondrant derrière la ligne (7-0). Les Espagnols réagissent par la botte de Linkdater à la 18e (7-3). Ce même Linkdater vendange 3 points à sa portée 5 minutes plus tard, avant que les visiteurs ne soient de nouveau châtiés à la 28e (10-3).Crédit vidéo : Rugby Europe
Rien n’est joué aux citrons. Cependant, les seuls points du deuxième acte sont inscrits par Florian Vlaicu sur pénalité à la 56e (13-3). Face aux intentions espagnoles qui ont essayé de bonifier tous leurs ballons, les locaux ont développé un jeu sobre autour de leur conquête et de l’occupation. Restrictif mais terriblement efficace. Le score n’évoluera plus dans un match viril, heurté et haché.
Alors que l’Espagne voit sa dynamique stoppée nette, la Roumanie se repositionne grâce à ces 4 points engrangés à la maison. Le job est fait dira-t-on. Les Roumains devront bien négocier leur déplacement chez les Russes, et ne pas passer au travers contre les Belges.
Les visiteurs, privés de bonus défensif, auront fait le voyage à vide. Ils auraient mérité mieux, et devront se relancer en vue de la qualification pour le Japon en 2019. Pour cela, il ne faudra pas se trouer contre l’Allemagne et la Belgique.
Les Tops
Florian Vlaicu
La Roumanie doit beaucoup à son N°12, brillant aujourd’hui. Le centre polyvalent de Calvisano a marqué la totalité des points de son équipe malgré des ratés au pied. Avec 85 essais et plus de 794 points marqués, il est logiquement le meilleur réalisateur roumain de l’histoire de la sélection.
La mêlée roumaine
Dominateurs dans ce secteur contre les Russes le weekend dernier, les Espagnols ont complétement pris l’eau face à la Roumanie. Et les locaux n’ont clairement pas hésité à s’appuyer dessus pour construire leur succès.
Le Flop
Le manque de réalisme des Espagnols
Les hommes de Santiago Santos étaient venus avec des intentions. Costauds en défense et plus joueurs que leurs homologues en attaque, ils n’ont pas su trouver la solution et portent la casquette du beau perdant aujourd’hui même si tout n’est pas à jeter. Il faudra construire sur l’état d’esprit et l’engagement défensif.
L’anecdote
L’arbitre italien qui s’est adressé aux joueurs espagnols et roumains en français, et à plusieurs reprises ! Et notamment aux joueurs de première ligne qui, jouant ou ayant joué en France pour la plupart, se retrouvent autour de la langue de Molière. C’est beau !
La décla d’après match
Titulaire en 3e ligne pendant ce match, Gautier Gibouin livre son ressenti.
Gautier, quelle est ta première impression après ce match perdu face à la Roumanie ?
Gautier Gibouin : On est déçus de repartir sans rien évidemment, c’est sûr qu’en face il y avait une grosse équipe, plus dense physiquement que la Russie, mais on était plus appliqués, on aurait pu prendre un point de bonus donc il y a de la déception.
Contre les Russes justement vous aviez été dominateurs en mêlée, aujourd’hui on vous a senti vraiment en-dedans dans ce secteur…
G.G. : On savait que ça allait être dur, les deux dernières fois où on est venus en Roumanie, on avait pris quarante points et ils nous avaient dominés devant. On a tenu pendant 20 minutes, mais après ils nous ont souvent emportés sur leurs mêlées. On gagnait les nôtres malgré quelques difficultés, c’est une équipe bien plus dense que les Russes devant.
Pourtant les intentions de jeu étaient de votre côté, eux ont développé un jeu vraiment fermé avec les gros et dans l’occupation…
G.G. : Ils sont très forts pour tenir la balle, ils ont eu beaucoup plus de possession. Quand on a eu la balle, on a essayé de les déplacer, mais on a peut-être un peu manqué de justesse technique. Il faut faire moins de fautes, tomber moins de ballons contre des équipes comme ça, c’est ce qui nous a manqué.
L’important c’est que tout n’est pas à jeter. Maintenant l’objectif c’est de faire un carton plein contre les Belges et les Allemands ?
G.G. : Oui c’est l’objectif pour la Coupe du Monde, il faut gagner contre la Belgique et l’Allemagne. On est déçus parce que la Roumanie avait perdu en Allemagne donc si on les avait battus, on aurait fait un pas énorme vers la qualification. Mais rien n’est perdu, on est dans les clous. On avait pour objectif de ramener 5 points sur les deux premiers matchs, là on est à 4, on n’est pas hors course.
Gesseleff
@thomasche, petite précision c'est "Florin Vlaicu" et non Florian, et puis il n'a pas marqué 85 essais (ce qui aurait fait de lui le meilleur marqueur de tous les temps) mais que 8 je pense que tu voulais parler de son nombre de sélections.
Un riz savant scie
Ce match vaut pour l'anecdote. On devrait en prendre de la graine au niveau politique. Que l'on ne se plaigne pas d'être déclassé sur le plan international alors qu'on ne livre plus de visas aux étudiants étrangers (hormis les Asiatiques que l'on fait venir pour suivre des cours en anglais) et que la favorite au scrutin national est ouvertement xénophobe.
Le rugby montre que rien n'est acté et que le français du fait de l'attractivité des divisions même amateur françaises et de leur ouverture cosmopolite peut progresser et devenir une langue internationale en terra incognita. D'ailleurs, de plus en plus d'arbitres apprennent le français et quasiment tous les arbitres internationaux de l'hémisphère nord le parlent, sauf Nigel Owens. C'est beau comme vous dites.
Armchair Fan
Ça peut sembler un mauvais match pour l'Espagne, mais c'est le meilleur résultat en Roumanie depuis 1988...