XIII. France Féminines privée de Coupe du monde - Sonia Zaghdoudi : "On se sent trahies et déçues"
La vice-capitaine de France XIII revient sur l'absence de la sélection au prochain Mondial. Crédit photo : Facebook Sonia Zaghdoudi
Alors que leur Fédération avait assuré leur participation au Mondial 2017, le Président de la FFR XIII a annoncé il y a deux mois que les Féminines ne feraient pas le déplacement en Australie, faute de budget.

Comment en est-on arrivés là ?

Pour comprendre cette situation ubuesque, petite séance de rattrapage sur la dernière décennie du rugby treiziste féminin en France. Née en 2007, l’équipe nationale féminine a dû s’autofinancer pour participer aux Mondiaux 2008 en Australie et 2013 en Angleterre.

Lors de leur première participation, les filles sont parvenues à trouver elles-mêmes leurs sponsors, malgré des démarches pesantes et usantes. Cinq ans plus tard, tandis qu’une situation similaire se profile, les joueuses montent au créneau dans un premier temps : si la Fédération ne finance pas leur déplacement en Angleterre, elles n’iront pas. Finalement, elles devront compter sur elles-mêmes et s’autofinancer à nouveau, et ce alors que la Fédération a financé un an auparavant leur tournée de matches amicaux en… Angleterre.

Aujourd’hui, les Bleues se voient privées de Mondial en 2017, pour des raisons budgétaires. Face à ces difficultés budgétaires chroniques, des questions méritent d’être posées. La vice-capitaine des féminines Sonia Zaghdoudi, également entraîneur du Toulouse Ovalie XIII, accepte d'y répondre et livre son ressenti sur cette situation.

La Fédération Française de Rugby à XIII contrainte de priver ses équipes de Coupe du mondeBonjour Sonia ! Tout d’abord, pouvez-vous nous présenter un peu votre parcours, notamment rugbystique ?

Bonjour, j’ai débuté le rugby à XIII il y a 15 ans au club de Toulouse Ovalie XIII, où je suis encore actuellement. Je fais partie des pionnières de France féminine depuis 2007. Au sein de l’équipe, j’ai participé aux deux dernières Coupes du Monde en 2008 et en 2013. 

Entrons dans le vif du sujet : pouvez-vous nous rappeler comment se sont enchaînées les nouvelles ces derniers mois, jusqu’à l’annonce de Marc Palanques ?

Nous avons été tenues au secret jusqu’au dernier moment. Il y a quelques mois déjà, la Fédération Australienne avait débuté la communication autour des équipes ayant déjà officialisé leur participation pour le Mondial, et la France féminine n’en faisait pas partie, au contraire de notre équipe masculine. On nous a alors affirmé que rien n’était encore décidé. Qu’il n’y avait pas d’inquiétude à se faire, que la Fédération s’était engagée verbalement auprès de nous, un an avant pour notre participation étant donné les résultats sportifs réalisés. 

Cette décision s’est imposée à Marc Palanques en découvrant l’état désastreux de la trésorerie de la Fédé lors de sa prise de fonction. L’ancien président avait quant à lui déclaré la Fédé en bonne santé financière quelques mois plus tôt… On a l’impression que sa gestion n’est pas claire et que vous en payez les pots cassés.

On se sent extrêmement trahies et déçues. On avait espéré avoir appris de nos erreurs passées. On nous avait certifié que le plus difficile pour notre équipe était passé, que les joueuses pouvaient se concentrer uniquement sur le sportif comme dans n’importe quelle discipline. Il est très difficile d’encaisser la nouvelle et de rebondir.

Aujourd'hui, nous nous rendons compte que la situation n’est pas claire et que malheureusement, les femmes en font encore une fois les frais. Il y a quelques temps, on nous affirmait que l’équipe de France féminine était considérée comme une équipe à part entière. On voit très bien que ce n’est pas le cas. Nous n’essayons pas de vivre au détriment d’une autre équipe, mais seulement d’avoir la place qui nous revient. 

En admettant que la Fédération ne puisse pas financer elle-même votre Mondial, il est tout de même incroyable que les joueuses aient pu trouver suffisamment de fonds extérieurs à deux reprises, et que la Fédé ne fasse pas ces démarches. Savez-vous quelle est la position des dirigeants face à cela ? Personne ne se charge de vous trouver des sponsors ?

Je me pose la même question. Apparemment pas. Des promesses ont été faites et aucunes n’ont été tenues.

Si vous aviez été prévenues à temps, vous auriez aisément pu vous autofinancer à nouveau. Afin d’éviter ce genre de désillusions à l’avenir, n’envisagez-vous pas de trouver vous-même des sponsors permanents ?

Si on nous avait dit, il y a un an, que la Fédération n’avait pas les fonds, les joueuses se seraient retroussées les manches et auraient fait les démarches comme lors des deux derniers Mondiaux. Il faut que la situation change et change véritablement. La nouvelle présidence veut redonner des objectifs à notre équipe de France, nous attendons de voir. 

Dans son « Plan de Féminisation des Instances Dirigeantes au sein de la FFR XIII » de juin 2013, la FFR XII voulait « s’engager (…) avec des moyens humains et financiers adaptés ». Finalement, on ne vous donne pas les moyens de progresser sereinement, l’enveloppe allouée aux féminines par la Fédération est dérisoire, n’avez-vous pas le sentiment que l’équipe féminine a été créée sans projet concret ?

Tous les éléments de réponse sont dans votre question.

Le moral des joueuses doit en pâtir. Certaines songent-elles à quitter le navire ? Comment vit le groupe malgré cette déception ?

Je ne peux pas me prononcer au nom des joueuses. Pour la plupart, elles ont joué leur première sélection, elles sont très jeunes. Elles n’ont pas connu les efforts de toutes les anciennes treizistes internationales qui se sont démenées pour que le groupe en soit là aujourd’hui. Mais pour celles qui sont comme moi, on est pleines de doutes. Il va falloir encore une fois faire des efforts de ce côté-là malgré tous les sacrifices déjà faits. 

Quels sont les objectifs des Féminines à court et long terme ?

Pour le moment, on nous parle d’un match de revanche contre l’Angleterre mais celui-ci n’aura pas la même saveur pour chacune des équipes. Ainsi qu’une éventuelle Coupe d’Europe bien que les seules équipes en Europe soient les Anglaises et nous. J’espère que la nouvelle présidence réussira à travailler avec d’autres nations pour réaliser ce projet dont on a déjà entendu parler. Sinon, mis à part l’Angleterre, il faudra attendre la prochaine Coupe du Monde pour que l’équipe parte en compétition. Dans le Pacifique, la place des femmes a bien évolué. Il nous faut suivre la dynamique.

A titre personnel, comment voyez-vous votre avenir en Bleue ? Avez-vous envie de continuer malgré le manque de soutien de vos dirigeants ?

On ne refuse pas une sélection. Nous n’avons pas cet état d’esprit dans notre groupe. Il nous faut continuer pour tout le travail fourni jusqu’à présent même si par moment, la motivation n’y est plus. J’ai déjà entamé ma reconversion en tant qu’entraîneur. Je souhaite contribuer d’une autre manière pour faire avancer les choses. Et j’espère que d’autres comme moi s’impliqueront en tant que dirigeante ou entraîneur pour faire en sorte de ne plus se retrouver dans cette situation.

Je pense qu’en plus du soutien de notre Fédération, notre développement passera par notre implication également en dehors des terrains.

Le mot de la fin ?

Je déplore qu’on ne parle uniquement de nous dans cette situation. J’espère qu'elle va véritablement changer.


Rugby à XIII, crossfit, passion : voici Alice Varela, capitaine de l'équipe de France Féminines

Vous devez être connecté pour pouvoir participer aux commentaires

Connait-on le montant du budget ? Juste pour savoir comment les fédés ou le Ministère peuvent être pingres... 🙁

Derniers articles

News
News
Transferts
News
News
News
News
News
News
News
Transferts