Vous êtes nombreux, sur notre site, à apprécier les histoires singulières dont regorge notre rugby chéri. Notamment en amateur, loin du monde aseptisé du rugby professionnel aujourd’hui. Puisqu’on se plaît à les raconter aussi, en voici une que vous pourriez apprécier. Celle d’un certain Dorian Hermet, 3/4 centre du RC Aubagnais, club sur lequel vous avez d’ailleurs pu lire un reportage sur le 16ème de finale remporté face à Vergt et synonyme de montée en Fédérale 2, cette semaine. Le nom d’Hermet, donc, puisque c’est de lui qu’on cause, ne vous évoque-t-il pas quelque chose ? Un truc comme 55 capes en équipe de France et un statut de capitaine emblématique des Bleues, de 2017 à 2022. Car oui, Gaëlle Hermet est bien la grande sœur de Dorian, ne vous y trompez pas.
RUGBY. Coupe du monde féminine. ‘‘Nous sommes prêtes à saisir notre chance’’ assure Gaëlle HermetIssu d’une famille de rugbymen (le papa évoluait à Clermont-Ferrand à l’époque) dont le frère Hugo porte notamment les couleurs d’Oyonnax, le garçon de 24 ans naît comme tous ses frères et sœurs en Auvergne, avant que toute la petite famille ne s’installe dans le Tarn, où vivent notamment les grands-parents. "Plus facile avec 4 enfants", sourit Dorian. Formé à Carmaux, cette petite ville championne de France en 1951 et aujourd’hui en régionale 2, c’est du côté d’Albi qu’il fera l’essentiel de ses gammes, des sélections départementales puis régionales aux Espoirs, jusqu’aux pros, avec qui il jouera une saison sous les ordres d’Arnaud Méla, en Fédérale 1 élite. Malgré cela, la porte est relativement fermée pour les jeunes, barrés par les objectifs élevés du club qui font donc la prime aux garçons expérimentés et autrefois pensionnaires des deux élites françaises.
On entretien un lien fort avec la fratrie. Ma soeur est venue me voir jouer à Aubagne, je suis allé voir mon frère Hugo 3 fois à Oyonnax cette saison... C'est important de conserver cela, même si on est 4 coins de la France.
Résultat, Dorian comme d’autres jeunes prometteurs de sa génération (l’ouvreur de Béziers Romain Uruty notamment) sont gentiment poussés vers la sortie. "Dodo" rebondit alors au sud de Toulouse, du côté de la plus petite commune à compter un club de Fédérale 1 encore aujourd’hui : St-Sulpice-sur-Lèze. Dans ce village de 2400 habitants, il y retrouve "l’humain au cœur du projet et quelque part le goût du rugby", chose qui lui avait tant manqué durant son ultime saison dans le Tarn, selon ses mots. Une équipe avec laquelle il infligera d’ailleurs sa seule défaite de la saison à Albi en 2019/2020, comme une petite revanche personnelle. Mais comment l’ancien compère d’Adrien Séguret au centre du SCA, qui affrontait encore Tarbes ou Blagnac il y a moins de 3 ans, s’est retrouvé à 400km de là, dans la région marseillaise et à jouer en Fédérale 3 aujourd’hui ?
La police, Marseille et le changement de vie
Le niveau de la ligue PACA est-il si élevé que cela ? Au vrai, c’est plutôt à un concours de circonstances qu’il faut rattacher cela. A l’époque, le Covid vient couper en plein élan 2 saisons de rugby consécutives à tous les niveaux amateurs et Hermet sent que c’est le bon moment pour passer ses concours de police. Bien classé, mais pas assez pour obtenir Toulouse, le garçon finit à Marseille, dans une ville où ceux qui aiment l’action sont servis. Un changement de vie et un trait définitif sur le rugby professionnel pour le 2ème de la fratrie Hermet : "ça a été un vrai bouleversement dans ma vie, mais c’était un choix aussi. Je ne savais pas trop où je mettais les pieds et je savais que j’aurai aussi beaucoup moins de temps pour moi. Et puis dans le 13, ce n’est pas comme à Toulouse ou l’on retrouve un gros club tous les 15 bornes. J'avais un ami qui connaissait le président d’Aubagne (alors ambitieux 1er de sa poule de Fed 3), il nous a mis en contacts et voilà comment j’ai atterri ici."
EXCLU. Adrien Séguret (Castres) : ''J'espère qu'à Marcoussis, on pense comme moi''Là encore, niveau rugby, c’est un grand chambardement. "C’est vrai que ça m’a fait bizarre en arrivant dans le 13. Le niveau est certes globalement beaucoup plus bas que ce que j’avais connu dans le Sud-Ouest, mais tu tombes sur des mecs morts de faim, qui compensent leur manque de technique par le fait qu’ils ne lâchent jamais rien. C’est loin d’être facile. Et puis certains matchs ici sont vraiment des guerres de tranchées (rires)." Pourtant, ce joueur compact (1m80 pour 88kg) mais qui s’épanouit pleinement dans le jeu de mouvement trouve malgré tout ses marques assez rapidement. En aidant aussi le RCA à passer un cap derrière, offensivement notamment, à l’image de ses 8 essais en 16 matchs cette saison. "Dorian, c’était mon gars au-dessus derrière. Puissant, intelligent, régulateur de la ligne de 3/4, quoi", nous confiait au détour d’une conversation l’ancien coach des arrières d’Aubagne, Kamal.
Quid de la possibilité d’aller jouer plus haut, dans le Sud-Est ? L’emploi du temps de celui qui compte quelques capes en équipe de France police ne lui permet pas cela, de toute façon. "J’ai été contacté par Berre (Fédérale 1) et le RCHCC (Nationale 1) de Greg Le Corvec qui étaient intéressés par mon profil. Mais avant même d’entamer les discussions, je savais que cela pourrait pas aboutir. Faire 1 heure de route pour aller m’entraîner ou carrément faire du rugby tous les jours comme c’est le cas à Hyères, ce n'est pas possible, encore moins dans un métier comme le notre où tu ne comptes pas tes heures." Avant de compléter : "c’est vrai que c’est aussi là où cette montée en Fédérale 2 avec le club va nous et me faire du bien. Je pense qu’on le mérite et personnellement, ça va aussi me permettre de me rapprocher un peu plus de ce que j’ai connu durant mes premières années séniors. C’est un beau challenge."
AMATEUR. Je suis allé voir un 16ème de finale de championnat de France de Fédérale 3 pour vous
Reste qu'avant de quitter la dernière division fédérale, le RC Aubagne a encore quelque chose à aller chercher : "depuis le début de saison, on sait quels sont nos objectifs. En l'occurrence, aller chercher une montée et essayer d'aller au bout en championnat de France. Pour l'instant, on a fait la moitié du chemin." Prochaine étape de ce qui ressemblera peut-être à une épopée d'ici 1 mois et demi, le 8ème de finale face à Auxerre, tombeur du Pays de Gex et de Roubaix jusqu'ici. Là où l'expérience de garçons comme Hermet - et d'autres - dans les rangs provençaux, pourraient faire la différence...
duodumat
Bel article. Merci.
Aubagne ça doit le changer des bains de pieds dans les eaux troubles de la Lèze !
Belle trajectoire ce garçon avec un riche ADN familial.
Jièl
@fondacci
J'aime décidément beaucoup vos articles, merci !