Nouveau poste, nouvelle vie, nouveaux défis, Mathieu Bastareaud se confie
Mathieu Bastareaud découvre un nouveau rugby chez les avants. Crédit photo : Smartpower
Depuis son arrivée à Lyon, Mathieu Bastareaud évolue au poste de 3e ligne centre. C'est comme s'il redécouvrait le rugby.

Comment te sens-tu avec les avants ?

J’étais un peu perdu au début. J’avais un peu l’impression de réapprendre le rugby même si les 3es lignes, c’est ce qui est le plus proche des ¾. Ce n’est pas du tout les mêmes repères, le même travail. C’est un autre rugby. Sur les phases de jeu, on ne me demande pas les mêmes placements. En tant que centre, j’étais sollicité sur le premier temps de jeu puis sur le 3e voire le 4e. Quand tu joues devant, tu fais premier, puis en soutien, après tu te replaces car tu vas être utilisé. Tu as aussi la mêlée, la touche, et avec ce rugby qui va de plus en vite, tu n’as forcément le temps de réfléchir. Je suis devenu beaucoup clément avec les avants. Avant, je ne comprenais comment les mecs pouvaient oublier un truc qu’on avait travaillé toute la semaine. Maintenant je comprends totalement que tu puisses avoir les fils qui se touchent surtout en première et deuxième ligne. Tu as tellement d’informations à gérer : tu passes de lifteur, à soutien, etc. Donc pardon messieurs les avants si j’ai pu être dur pendant quelques années.

Est-ce que tes nouveaux coéquipiers t'ont un peu charrié au début ?

Non, car ils ont vu que je « débutais » mais que j’étais impliqué pour comprendre les placements, les annonces en touche, les postures en mêlée. C’est un vrai travail collectif, même en 8, avec la façon dont tu tiens les deuxièmes lignes. Il y a plein de mouvements comme le sens pour arracher le ballon dans les rucks, auxquels tu ne fais pas attention quand tu joues derrière. Au début, c’était compliqué parce que ce n’était pas forcément naturel. Comme lorsque les avants doivent aller dans le sens, j’avais tendance à rester traîner car lorsque tu es ¾ on te demande de recharger s’il y a un coup. Donc moi je perdais mon groupe. Je me prenais aussi la tête car je voulais bien faire alors je m’éparpillais beaucoup sur le terrain. En discutant avec Pierre (Mignoni, entraîneur du LOU, ndlr.) et David Gérard (entraîneur des avants, ndlr.), on a décidé de se concentrer sur ce que je savais faire de mieux, sur mes points forts, pour me rassurer en défense.

Pour rétablir la vérité : est-ce c’est plus physique de jouer devant ?

Oui, carrément, c’est beaucoup plus physique. Tu as plus de contacts et plus de courses, de sprints répétés pour être là au soutien, en solution. Mais ça me plaît de relever ce défi après avoir joué 12/13 ans derrière. C’était une manière de me lancer un nouveau challenge. J’ai eu la chance de gagner beaucoup de trophées. C’est une manière de me stimuler car je sais que j’apprends tous les jours quelque chose de nouveau à l’entraînement.

Connaître les deux « postes » fait-il de toi un meilleur joueur ?

Je pense oui, parce qu’il y a des choses que les ¾ ne comprennent pas forcément devant et vice-versa. Donc moi je fais tampon entre les deux. Je sais mieux juger certaines situations et ça complète un peu plus mon jeu.

Depuis tu joues devant, tu utilises également des crampons particuliers. Tu peux nous en parler ?

J’avais déjà testé ces crampons à Toulon en position de centre lors du quart de finale contre Lyon (défaite après prolongations à Mayol en 2018). J’étais superstitieux, je n’avais pas vraiment pris le temps d’étudier le produit mais je trouvais ça intéressant. Quand Smart Power m’a recontacté, ce n’était pas me disant « tiens mets ça, c’est les meilleurs ». Il y a de vraies études derrière ces crampons. C’est quelque chose de sérieux. Avec le changement de poste, les phases de poussée et le fait de passer d’une phase statique à la course, j’ai senti une différence par rapport aux crampons normaux. Ici, on peut les orienter selon le profil du joueur : un pilier n’aura pas la même orientation qu’un 3e ligne ou un ¾. Idem pour la longueur.

Quel est ton ressenti sur ces crampons ajustables ?

Avec Lyon, j’ai utilisé ces crampons face à Brive où j’étais titulaire puis contre Bordeaux. Toute la semaine, je m’entraîne avec et on s’y habitue vite. Et je n’ai pas de douleurs aux lombaires, ce qui peut arriver quand on change de crampons. J’ai eu un problème musculaire pendant la semaine, alors avant le match on a rééquilibré les crampons et ça a été nickel. En général, les marques de chaussures proposent des crampons à la fois moulés et vissés. Mais quand on joue sur un terrain gras, on en met des plus longs, mais la taille des moulés reste la même. Du coup, il y a un déséquilibre et le dos charge. Tandis qu’ici, la forme du crampon fait que de toute façon tu vas accrocher.

Ce matin (jeudi matin, nldr.) à l’entraînement, j’avais laissé les Smart au casier et j’ai vu la différence avec les classiques : je ne me sentais pas « safe » sur les appuis. J’avais l’impression qu’à tout moment, sur un crochet ou sur la reprise d’appuis, que je pouvais glisser. La confiance y est aussi pour beaucoup surtout si tu fais un bon match avec.

Est-ce que c’est un produit que tu conseilles aux amateurs ?

Oui, tout à fait. Ce n’est pas dédié qu’aux joueurs des championnats pros. Au contraire, le produit est accessible à tous. Après, ce sont des crampons assez particulier donc il faut un temps d’adaptation. Il ne faut pas les mettre le vendredi pour jouer le samedi. Et puis, ça dépend aussi du ressenti du joueur : s’il ne se sent pas bien avec, il ne faut pas insister non plus.

Direction les USA dans quelques semaines : tu vas jouer devant ou derrière ?

Je joue mon dernier match le 9 novembre face à la Rochelle ensuite j’enchaîne trois semaines avec les Barbarians britanniques et après je pars. On n’en a pas encore discuté avec le nouveau coach car il est avec la sélection américaine à la Coupe du monde. Jouer aux deux postes sera plus un avantage pour moi qu’un problème. Et ça donnera plus de possibilités à l’entraîneur.

Tu vas d’ailleurs croiser la route de ton ancien coéquipier Ma’a Nonu (le Néo-Zélandais, passé par Toulon, a signé à San Diego, ndlr.).

J’ai vu ça oui, c’est une super nouvelle pour le rugby américain et international. Qu’un joueur comme Ma’a Nonu signe là-bas va apporter une plus-value et une visibilité supplémentaire sur le championnat. Le niveau du rugby américain va augmenter. Je pense que les Etats-Unis peuvent devenir le Japon d’aujourd’hui car ils ont le potentiel et le réservoir pour le faire. Il ne leur manque que la pédagogie car ce n’est pas un pays rugby. C’est justement en « ouvrant leurs frontières » à des entraîneurs et des joueurs étrangers qu’ils pourront se développer. Quand on voit ce qu’ils ont fait en peu d’années à 7, ça peut faire mal.

Pressé de partir ?

Pressé oui et non car c’est une nouvelle aventure, un nouveau championnat. C’est excitant quand même car je n’ai jamais vécu à l’étranger. Qui plus est aux USA et à New York ! Avec Ma’a qui signe, ça rajoute un peu de piment. Et non, parce que quand ça se passe bien ici, tu as envie de continuer. Mais c’était le deal, il n’y a pas de soucis par rapport à ça. Je suis impatient d’aller là-bas même si ça va passer très vite car la saison est courte. Les matchs vont s’enchaîner mais j’ai prévu d’aller voir de la NBA, du football américain. Le base-ball, on m’a dit que c’était chiant par contre, et hockey il fait trop froid, pas la peine.

Un retour à Lyon avait été évoqué ainsi qu’un départ pour le Super Rugby ou le Japon. Est-ce que c’est toujours dans les cartons ?

Pour l’instant, un retour à Lyon ce n’est pas d’actualité. L’Afrique du Sud, ça a failli se faire mais il y a eu un couac. Si j’avais été patient, ça se serait fait mais je ne pouvais pas attendre par rapport à Toulon notamment. J’avais besoin de savoir rapidement car j’allais être papa. Je ne pouvais pas dire à ma femme au dernier moment : « Allez on part en Afrique du Sud ». C’est un rendez-vous manqué. Je ne sais pas si ça se refera. Honnêtement, je ne pense pas. Après, est-ce que j’aurais eu le niveau ? Au final, je ne regrette pas car les USA, ce sera une super expérience. Quant au Japon, c’est toujours dans mes projets, au moins comme touriste. Pour y jouer, on verra.

En parlant du Japon, tu as déjà vécu des annulations de match au dernier moment comme cela a été le cas avec le Crunch ?

Oh oui ! Je me souviens de ce match de Coupe d’Europe avec le Stade Français contre l’Ulster, ça avait été magnifique ! On devait jouer en Belgique au stade du Roi Baudoin. On arrive là-bas, et le match est annulé car le terrain est gelé. Du coup, on a pris le bus pour rentrer à Paris le samedi soir mais il fallait absolument qu’on joue. Comme c’était l’Ulster, les Irlandais…si on ne jouait pas, ils avaient match gagné. Le lendemain, on reçoit un message nous disant qu’on va jouer à Jean-Bouin. Sauf qu’il avait neigé. Donc le matin du match, on est parti déneigé le terrain, les joueurs et les supporters ! On a joué l’après-midi, et on a gagné.
[En partenariat avec Smart Power]

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  • CofCof
    17999 points
  • il y a 5 ans

Centre puis 8...
Prochaine étape pilier avant la retraite?

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