A 28 ans, Alice Varela, capitaine de l’Equipe de France Féminines de Rugby à XIII nous a décrit son parcours ainsi que son quotidien de sportive de haut niveau. Employée de banque, elle nous aide à découvrir sa passion : le Rugby à XIII féminin, tout en évoquant sa préparation physique, ses souvenirs et ses souhaits.
Depuis ton enfance, quels sports as-tu pratiqué ?
J’ai commencé par la gymnastique (5 ans) et l’athlétisme (2 ans), où l’on m’a repérée pour le Rugby à XIII que j’ai démarré à 16 ans, soit depuis douze années !
Tu as connu deux clubs.
J’ai joué 8 ans pour l’US Pujols XIII, avant de rejoindre les Zoulouzen de Toulouse Ovalie depuis 4 années.
Et tu as rapidement rejoint l’équipe de France…
J’ai été présélectionnée dès mes 18 ans. J’ai débuté en assistant aux stages sans jouer les rencontres. Ensuite, je suis devenue la remplaçante des deux titulaires aux postes de demi d’ouverture et demi de mêlée. A savoir qu’à XIII, ces deux postes se ressemblent beaucoup. Après une seule rencontre face aux Anglaises à l’été 2008, j’ai participé à la Coupe du Monde programmée en novembre.
As-tu joué en Equipe de France U16 et U18 ?
Pour l’instant, il n’y a pas d’équipes de France U16 ou U18 Féminines. En stage, nous invitons toutefois les filles trop jeunes mais talentueuses pour qu’elles apprennent au plus tôt.
Depuis quand es-tu capitaine avec Toulouse Ovalie et l’Equipe de France ?
J’étais déjà capitaine avec l’US Pujols XIII. A Toulouse, je le suis devenue la saison dernière. Et pour finir, je le suis en Equipe de France depuis 2015.
Quel rapport as-tu avec les plus jeunes joueuses ?
Nous devons préparer l’avenir de notre sport. Je suis dans les premières à intégrer une jeune et à dire haut et fort quand ça va ou non. Je vais les aider dans leur jeu car je deviens désormais l’une des plus âgées. Et notre rôle est de les tirer vers le haut. Laurent Dupuy, sélectionneur de l'Equipe de France Féminines, nous l’a clairement demandé pour que nous devenions de vraies coéquipières. En apprenant à se connaître, nous nous ferons confiance et nous ferons ainsi jouer la fille d’à côté, le tout en seulement quelques stages.
Pour être compétitive et rester internationale, quelles sont les exigences physiques ?
Bien entendu, la préparation physique est primordiale en équipe de France et, plus globalement, pour le Rugby à XIII. Premièrement, nous souhaitons éviter les blessures. Ensuite, nous devons être capables de tenir 80 minutes sur le terrain à 200%.
A quoi ressemble ta semaine sportive ?
Lundi - Crossfit / Mardi - Crossfit / Mercredi - Entraînement Rugby à XIII / Jeudi - Crossfit seulement si je n'ai pas match le week-end suivant / Vendredi - Entraînement Rugby à XIII / Samedi - Repos / Dimanche – Match avec les Zoulouzen !
En fait, tu apprécies cette préparation physique !
Oui, j'aime ! Au rugby, j’ai découvert ce type de séances. Après en avoir beaucoup subi, j’y ai pris goût. Je ressens ainsi de très bonnes sensations… Pourtant, j’appréhendais un peu la séance de crossfit d’après-Noël !
Tu adores également le crossfit.
Oui, j’ai connu ça grâce à une ancienne internationale, Elisa Labrunie. Après l’haltérophilie, elle s’est essayée au crossfit avec son compagnon Yohann Gigord, ex-international de Rugby à XIII en équipes jeunes devenu aujourd’hui Head coach dans une salle de crossfit toulousaine. Elisa déclarait : « Physiquement, ça change un corps ! ». Par curiosité, j’ai découvert la première salle de la région ouverte à Beauzelle. Prise au jeu, j’ai tout de suite adoré ce mélange d’haltérophilie et de gymnastique… tout cela lors de séances cardio. C’est un superbe défouloir où nous apprenons toujours sur la nutrition, le gainage et la technique. J’avoue disputer même quelques compétitions crossfit de quartier (rires). Ce sport est très sympa, motivant et très différent de la musculation avec son état d’esprit similaire au rugby.
Après la préparation physique, tu vas au contact en match. Que penses-tu à cet instant-là ?
Il faut différencier le contact en attaque et en défense. En attaque, je veux franchir la ligne, me battre en restant debout ou, mieux, faire la passe. En défense, je ne regarde que le ballon pour le sticker, c’est-à-dire pour le garder en otage… Il faut savoir que nous faisons de nombreux entrainements de lutte et de sticks de ballons dans le Rugby à XIII. Pour expliquer de manière simple, la première plaqueuse s’intéresse au ballon avant d’être aidée par une ou deux partenaires qui font tomber l’adversaire. Si possible, nous la retournons sur le dos pour ralentir le jeu adverse.
Que pensent les garçons des filles qui jouent au Rugby à XIII ?
En général, ils n’imaginent que ce soit « aussi rude ». Ils sont très souvent agréablement surpris par notre joli jeu.
Le Rugby à XIII te plait-il plus que le XV ?
Je préfère mon sport et le jeu… Il s’agit de 2 sports totalement différents malgré un même ballon ovale. D’abord, nous faisons un gagne-terrain pour sortir de notre camp. Et nous disposons de seulement 5 tentatives pour marquer. Non, ce n’est pas du rentre-dedans ! Je trouve le XIII moins brutal que le XV. Effectivement, sur les 2 ou 3 premiers tenus, c’est rude au contact pour gagner des mètres avant d’aller jouer au large à partir d’une certaine distance. Par exemple, il est très dangereux de perdre le ballon dans son camp car défendre ces cinq actions va être très physique… Le Rugby à XIII est un jeu beaucoup plus réfléchi que beaucoup ne le pensent.
Et que pensent tes parents ?
Avec un peu de réticence au début, mon père quinziste s’inquiète moins que ma mère, sauf pour la crainte naturelle des blessures. Finalement, ils se sont pris au jeu en devenant mes plus grands fans. Ils viennent assister à un maximum de matchs. Tu as dû constater que des sports d’équipe féminin (foot, rugby, handball, basket) gagnent de la médiatisation. Dans le Rugby à XIII, les garçons sont diffusés lors des rencontres internationales (France – Angleterre du 22.10.2016 diffusé sur LLa chaîne L’Equipe) et lors des finales du championnat français. Sans être gourmandes, nous aimerions que lors de France – Angleterre, les commentateurs évoquent à la télé notre lever de rideau, pourquoi pas avec quelques images ! Ils montreront ainsi qu’il y a une équipe de France Féminine qui a joué face aux Anglaises… Le public saura ainsi que nous existons !
Raconte-nous ta première Coupe du Monde en 2008 !
En Australie, pour la première participation des Françaises, nous sommes parties sans financement. Nous avons payé nos billets pour vivre l’événement de notre vie. Nous avons affronté une des meilleures équipes mondiales. A titre personnel, j’avais seulement affronté les Anglaises avant d’être sélectionnée en Coupe du Monde. Sur le terrain, ça a été très difficile physiquement. En novembre, c’est la saison estivale australienne. Nous avons affronté les Australian Jillaroos, mais pas les Néo-Zélandaises. Il y avait les Samoa, les Iles Tonga ou la Russie à notre portée ! Lors de cette expérience inoubliable, nous remportons 1 victoire pour 4 défaites. Ces 5 matchs ont été joués en 10 jours ! Programmées en avant-matchs de la Coupe du Monde masculine de la Police, nous avons découvert un autre monde, un Rugby à XIII différent devant plusieurs milliers de spectateurs ! Avec l’hôtel en bord de mer, cela reste une des meilleures expériences de ma vie.
Comment s’est déroulée la seconde Coupe du Monde en 2013 ?
Organisée Outre-Manche, il nous a été demandé de participer financièrement pour disputer cette Coupe du Monde. Il y a eu désaccord, boycott des filles opposées à payer quelques centaines d’euros par principe ! Finalement, nous avons trouvé nous-mêmes les fonds nécessaires. Une ancienne internationale Cécile Segharia nous a trouvé le dernier sponsor Bricomarché (47) qui a permis l’aventure. En Angleterre, il n’y avait que 4 équipes. Sans partir défaitistes, nous savions que le défi était de taille. Jouer la Nouvelle-Zélande est notre plus beau souvenir. Nous rêvions de les rencontrer et ce fut exceptionnel au-delà d’un score trop lourd. Nous avons joué les trois équipes avant d’affronter à nouveau les Anglaises pour le classement.
Au niveau international, quels autres moments forts as-tu connu ?
Tous les rendez-vous avec l'équipe de France sont forts et intenses. Les stages nous permettent de nous connaître davantage et de partager une vie de groupe, ce qui nous permet de mieux jouer sur le terrain avec confiance. Certes, les Coupes du Monde restent plus intenses physiquement car nous enchaînons les rencontres. Or, nous n’avons pas encore pris cette habitude.
En 2016, nous avons pris note que « ce ne sont pas seulement les Féminines qui n’iront pas en Australie mais aussi notre XIII Fauteuil et nos Universitaires. Un Tournoi Européen (féminin ndlr) avec plusieurs équipes est déjà sur les rangs et qui se déroulera en juin 2017 ». Cette citation provient d’un communiqué de presse du Président de la FFR XIII Marc Palanques datant du 23 décembre 2016. Qu'en penses-tu ?
Tout d’abord, les équipes de France XIII Fauteuil et les Universitaires sont autant déçues que nous ! Difficile à digérer, j’espère de tout cœur vivre cette Coupe d’Europe 2017 en France ou ailleurs dans le vieux continent. Le capitaine des XIII Fauteuil est déçu mais prend en compte que sa Coupe du Monde a été déplacée en France. Nous apprécions cette nouvelle et espérons le même coup de pouce pour les Féminines.
Qu’attends-tu de ce « tournoi européen avec plusieurs équipes déjà sur les rangs et qui se déroulera en juin 2017 » ?
Nous aimerions rencontrer d’autres équipes, même des petites jamais rencontrées. Nous entendons parler des Espagnoles et des Italiennes. Même si l’événement se déroule en France, nous serons contentes et espérons un peu de médiatisation. Ce serait un plus.
Le XV de France féminin dispute 11 rencontres cette année (tournoi d’Automne, Six Nations et tournoi estival). Les treizistes australiennes et néo-zélandaises se rencontrent plusieurs fois chaque année. Combien de rencontres internationales faudrait-il programmer pour notre équipe de France Féminine à XIII ?
Habituellement, nous nous déplaçons 1 année sur 2 en Angleterre. Outre-Manche, nous rencontrons leur équipe nationale, l’Angleterre militaire et l’Angleterre Universitaire pour disputer trois matchs. Nous pourrions planifier une rencontre supplémentaire en milieu d’année car, en fin de saison, nous comptons quelques blessées. Ce serait sympathique et intéressant. Et puis, nous aimerions rencontrer d’autres joueuses que ces Anglaises !
Tu fais aujourd’hui parti des doyennes. Quand as-tu prévu de raccrocher les crampons ?
Je pensais arrêter après la Coupe du Monde. Finalement, tout est remis en question. De plus, je ne saurais plus quoi faire de mes dimanches consacrés depuis 12 ans au rugby à XIII… Quelle angoisse… Effectivement, il faudra arrêter car ça fait mal au bout d’un moment. Je m’imagine jouer encore 1 ou 2 années.
Après ta carrière de joueuse, souhaites-tu contribuer au développement du XIII ?
Oui, je participerai à son développement. Mais je ne me vois pas entraîner en étant sur le bord du terrain. En fait, je ne me suis pas réellement posé la question. Oui, je souhaite aider ce sport où je ressens trop de lassitude… Il nous manque aujourd’hui des moyens. Nous sommes trop peu à vouloir avancer. Il nous faudrait plus de personnes réellement passionnées et investies comme André Janzac qui se bat depuis plusieurs décennies pour le Rugby à XIII et pour les féminines !
Alice nous donne rendez-vous Dimanche 8 janvier 15h00 pour la première rencontre d’Elite 1 Féminine au Stade Struxiano à Toulouse opposant Toulouse Ovalie face aux Déesses Catalanes !
Peggy Fristch – Présidente de la Commission des Féminines de la FFR XIII
N’ayant « malheureusement jamais joué au XIII », Peggy Fristch a commencé éducatrice avant d’être Présidente et, aujourd’hui, Secrétaire Générale de l’US Pujols XIII. Depuis juillet 2017, elle est devenue Présidente de la Commission des Féminines de la FFR XIII. Oeuvrant depuis une dizaine d’années, elle explique : « Je suis une fervente défenseuse du Rugby féminin. Malheureusement, il est impossible que les filles partent à la Coupe du Monde 2016 en Australie malgré tous les sacrifices consentis. Nous leur avons évoqué une Coupe d’Europe. La Direction et le Conseil d’Administration de la FFR XIII sont aujourd’hui déterminés et en pourparlers avec les autres Fédérations nationales. »
Elle poursuit sur le développement du XIII et l'envie de disputer plus de matchs :
Oui, nous souhaitons faire connaître notre sport et également disposer de ces compétitions. C’est « dans les tablettes ». Toutefois, le Rugby à XIII doit se développer dans les pays européens pour que nous avancions alors que le XV se développe partout, même en Afrique ! Nous sommes dans les prémices du XIII avec des pratiques aménagées où les filles jouent notre sport à 9, à 11 et à 13. Nous remarquons que de nombreuses féminines ont la double licence à XV & XIII. Par exemple, nous souffrons d’un manque de budget pour participer aux Coupes du Monde et réaliser des tournées. Nous n’avons pas créé de miracles en quelques mois. Pour rappel, Marc Palanques a été élu en juillet 2016. Nous avons besoin de temps et nous manquons du nerf de la guerre : l’argent. Bientôt, nous espérons connaître le même développement que le Rugby à XV.
Retrouvez le reportage XIII Filles en Ovalie réalisé par France 3 sur le Rugby à XIII Féminin :
Crédit vidéo : Rugby au Féminin
Hooligan
Demander à une treiziste si le XIII lui plaît plus que le XV ? WTF ?! Vraiment ?! oO' Interview sympa malgré tout, sur ces filles d'abord, et sur la galère de cette fédération et ses licencié(e)s.
#StaffSupporters
nico la masse
excellent, super article pour les filles !
même si tous les jours je me dit que y a rien a y faire je préfère le XV (le vrai, pas celui du T14 😊)
par contre ElisA Labrunie s'appelle ElisE ...
ced
déjà que à XV c'est dur de percer à XIII ... on va attendre longtemps
dommage car l'esprit du rugby est plus conservé chez les filles aujourd'hui que n'importe où ailleurs