Le 18 janvier dernier, l'ouvreur de Rouen Jordan Michallet se donnait la mort. Une nouvelle qui avait ému le rugby et qui mettait une nouvelle fois sur la table le sujet de la dépression, encore tabou en France et au sein du rugby, dans lequel il est encore difficile d'avouer ses ''faiblesses''. Dans un entretien pour Canal Plus, Noélie Michallet, épouse de Jordan, a décidé de s'exprimer sur cet évènement tragique. Déjà, pour rendre un dernier hommage à son mari défunt, mais surtout pour que la parole se libère, autour de la dépression. Elle décrit Jordan comme un personnage toujours souriant, de bonne humeur, qui tirait tout le monde vers le haut. Avant de poursuivre : ''Il traversait une petite semaine, avec une baisse de moral comme ça peut arriver à tout le monde. Il était très fatigué moralement et physiquement. Il avait une certaine pression parce que le club se retrouvait près de la zone relégable, mais il avait toujours ce sourire sur lui. On venait de faire l'échographie de notre enfant et il était très heureux de savoir qu'il attendait une petite fille [...] Aucun geste, aucune parole, aucune action pouvait présumer à ce tel geste, parce que ce geste représentait l'inverse de Jordan.''
Le monde du rugby français choqué et ému par la disparition de Jordan Michallet
Elle revient sur cette pression quotidienne du sportif de haut-niveau, qui peut parfois être néfaste : ''Il m'a dit : ''Je n'ai pas le droit de lâcher l'équipe''. Pour lui, c'était impensable d'avoir, ne serait-ce que quelques jours de repos. Ça le rendait malade d'être affaibli, fatigué. Pour lui, c'était ''impensable'' de devoir abandonner ses coéquipiers ou son équipe.'' Elle regrette que le sujet soit encore tabou, prenant l'exemple de son mari, qui n'a pas osé parler de son mal-être : ''C'est allé très vite. En une semaine tout s'est dégradé. Jordan n'a pas osé en parler ou alors trop tard. Je sais que le club de Rouen, s'il avait eu le ressenti et les émotions de Jordan, aurait été là pour lui. Je sais qu'il l'aurait aidé, qu'il ne l'aurait pas lâché. Malheureusement, un joueur a toujours honte d'avouer ses faiblesses, de dire qu'il va mal, qu'il est fatigué, et je pense qu'il a eu peur du jugement''.
CARNET NOIR. Disparition tragique de Jordan Michallet (Rouen)
Dans un sport où il est très dur d'avouer ses moments de doute, dans lequel il faut toujours se montrer fort, il est regrettable que le sujet de la dépression ne soit pas plus traiter au sein des clubs. Noélie Michallet espère que les choses changeront : ''Ce serait essentiel (de s'occuper davantage de la partie mentale NDLR) et ce serait une clé en plus, d'avoir dans tous les clubs une personne qui accompagne. Non pas pour avoir plus de performances, mais justement pour prévenir à ce genre de drame [...] Ce n'est pas normal que la dépression fasse référence à une faiblesse.'' Avant d'affirmer, que plusieurs joueurs de rugby, lui ont avoué avoir connu de gros moments de faiblesses dans leur carrière : ''Depuis ce drame, j'ai eu énormément de témoignages de joueurs de la France entière ou même de l'étranger. Pas un ne m'a dit qu'il n'avait pas eu une dépression dans sa carrière. Mais aucun joueur n'ose en parler, que ce soit à leurs coéquipiers, à leurs entraîneurs, parce que c'est un milieu où on doit toujours être fort, donner le meilleur de soi-même. On peut jouer avec des blessures mais on continue. On peut avoir des douleurs extrêmes pendant les matchs, mais on ne s'autorise pas à sortir. Il n'y a pas eu que Jordan et j'ai pu ressentir le mal-être de certains joueurs.''
christobal
Tellement triste.
Bravo madame, vous faites honneur à votre mari et faites preuve d’un incroyable courage. Puissiez vous être entendue.